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Critique de Root


Root
04 septembre 2018
« J'annote seulement les gares au gré du parcours. Tantôt dans le sens de la marche, tantôt à contresens. Je m'interdis de descendre à une station. Je m'autorise seulement le changement de quai. Seul le voyage compte. »

À bord du train qu'il imagine être sa mémoire, Bernard Chenez regarde défiler le paysage. Esquissant les rails à mesure qu'il se souvient, bousculant l'aiguillage si le coeur lui en dit, « pourvu que ça roule ».

Affranchi des contraintes de la vie et de ses éternelles questions auxquelles il n'attend désormais plus de réponses, il se remémore son premier job. Petit garçon de douze ans qui se sentait homme, l'information entre les mains, lorsque, pour un billet de dix francs, il passait deux heures à coller les adresses des abonnés sur un journal de gauche. Lui reviennent des images de sa mère, qui, comme toutes les mères, ne mourrait jamais. Ses premières amours, empreintes d'une timidité délicieuse, désuète. Puis ses élans d'ouvrier révolté, agité par le chambardement politique et idéologique des années 60. Puis… je me suis un peu perdue en route.

Le choix de l'auteur de négliger toute logique chronologique m'a déstabilisée. J'aurais aimé avoir à suivre un semblant d'histoire, pour m'attacher à celui qu'il fait renaître derrière ces brefs épisodes de vie. Je regrette d'autant plus d'être restée sur le quai de la gare (je joue le jeu) que tout est très joliment écrit. Brut et fin à la fois, simple, spontané. En peu de mots, chaque anecdote transpire une époque. Trop peu de mots peut-être. J'aurais voulu fallu m'attarder un peu, mais je n'en ai pas eu le temps. Ce livre relèverait-il d'une démarche quelque peu égoïste ? Que chacun en soutire ce qu'il peut ? Bizarrement, c'est à cette idée que je l'ai un peu plus apprécié. Pour qui écrit-on, après tout ? Il me fallait accepter les libertés prises par l'auteur dans la construction de ses souvenirs. Des souvenirs offerts (pas si égoïste que ça, le bonhomme) avec une grande tendresse.

Je ne me suis pas toujours sentie du voyage, mais j'ai lu de belles phrases, souri, humé d'autres décennies. La génération de Chenez (il est né en 1946) se laissera très certainement émouvoir.
Lien : https://lekilometremanquantw..
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