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Critique de leboncoinlecture


Quel ouvrage fantastique pour découvrir la calligraphie chinoise ! Je pense qu'il est indispensable, essentiel et à consulter avant tout autre si l'on veut en savoir plus sur le sujet -peut-être est-ce une naïveté de novice.
François Cheng commence par présenter dans une introduction très claire ce qu'est l'art de la calligraphie chinoise : un art de vivre en lien avec le taoïsme, une pratique méditative où le calligraphe fait corps avec le monde, où l'écriture-dessin-peinture est traversée par le souffle de son auteur.e faisant corps avec le monde.
Je ne résiste pas à l'envie de partager cette citation un peu longue pour vous aider à comprendre :
"Un trait n'est pas une simple ligne. Il est l'incarnation du souffle. Par ses pleins et ses déliés, par les infinies inflexions qu'il implique, il est à la fois volume et teinte, forme et mouvement. Mieux encore, le calligraphe exige qu'il soit os et muscles, chair et sang. D'ailleurs, il use volontiers des images de la nature pour décrire l'expression des traits de base : nuage étalé pour un trait horizontal, taillé à la hache pour un trait vertical, pierre chutant d'une crête pour un trait oblique, crâne de squelette pour une courbe sans bavure, chanvre éparpillé pour un trait qui s'éteint progressivement, fagot emmêlé pour un mouvement nerveux, clou arraché pour un point marqué, queue de serpent pour une main qui s'envole..." (p19-20). Dès lors, j'ai regardé les calligraphies présentées dans la deuxième partie avec un oeil plus averti, m'efforçant de suivre le "mode d'emploi" indiqué par l'auteur p 51 - bien que n'étant pas une lettrée chinoise... - "Tout lettré chinois possède l'art du trait : aussi, devant une oeuvre, ne reste-t-il pas passif ; il refait mentalement les gestes du calligraphe ; son esprit s'excite et entre dans la cadence de l'exécution." Et j'ai pu ressentir effectivement à certains moments ce souffle, ces gestes, cette force. Et ce d'autant mieux que l'auteur donne des précisions sur chaque calligraphie présentée, sur le contexte de création, et, ce que j'ai trouvé le plus intéressant et qui me conforte dans l'idée que connaître la langue de la calligraphie aide à jouir de l'expérience artistique et surtout spirituelle qu'elle constitue, il explique souvent le sens du mot et la composition de l'idéogramme chinois. Par exemple, celui du dragon (si j'ai bien compris...) est composé de l'idée d'"écailles" et de "bondir", en lisant cela, a surgi devant mes yeux le dessin traditionnel du dragon chinois aux ondulations marquées et en effet, la calligraphie dessinait cet idéogramme en faisant ressentir fortement ce mouvement. J'ai trouvé assez fascinant également la notion de "Trois" dont il a choisi de représenter la forme complexe du mot qui signifie également "participer", donnant dès lors toute l'épaisseur spirituelle que le Tao associe à ce chiffre, étant la base de la Création (le yin, le yang et le vide médian).
Il se trouve que j'ai lu une oeuvre de fiction de François Cheng juste après ce livre-ci et j'y ai retrouvé de nombreuses notions présentes ici, ce qui me fait penser que c'est un outil important pour également comprendre sa littérature, que je compte bien continuer à explorer. J'ai retrouvé cette même idée d'expérience sensorielle et métaphysique dans la pratique de la peinture et de la cithare décrite dans "la cithare nue" de Shan Sa, auteure chinoise exilée en France comme François Cheng, mais également dans la cérémonie du thé au Japon, dans les arts martiaux etc. Bref, tout cela contribue à éveiller ma curiosité toujours davantage, me poussant cette fois-ci vers le Taoïsme, l'histoire des idées en Chine, la poésie chinoise et la littérature classique... pour mieux faire corps avec ce monde !
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