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Critique de kuroineko


Tragédie romanesque en cinq actes, roman historique, roman chorale, roman de vie... François Cheng transcende les genres pour offrir une oeuvre originale dans sa structuration et remarquable dans sa narration.

Nous sommes vers 230-220 avant notre ère, dans ce qui deviendra la Chine. Époque charnière qui voit la fin de la période des Royaumes combattants et la fondation du Premier Empire sous la mainmise des Quin, dont sera tiré l'appellation Chine.
Outre le choeur à l'antique, qui présente et met en perspective les personnages et les événements, le roman donne la parole à un trio inoubliable: la belle Chun-niang (Dame Printemps), l'artiste prodigieux Gao Jian-li et le brillant guerrier féru de justice Jing-ko.
Dès le premier récitatif du choeur, et comme l'indique aussi le titre, on apprend que les deux hommes n'interviendront que sous la forme d'âme puisque morts des années auparavant.

Quand reviennent les âmes errantes est un vibrant et émouvant éloge de l'amour et de l'amitié vrais. Celui et celle qui unissent ces trois personnages pourtant marqués par la vie.
Leur histoire va rejoindre au cours des événements la grande histoire et ses turbulences. Violence des faits d'armes, mais également violence et dureté de la vie. Chun-niang a d'ailleurs du surmonter moult épreuves dès son plus jeune âge, subissant les vicissitudes de la misère et les turpitudes des hommes ravageant la féminité et la beauté.

Dans cet univers marqué par les fracas, le lien très spécial et fusionnel qui unit nos trois héros prend d'autant plus de valeur. Mais comme le dit François Cheng, noble amitié et noble amour offrent un "moment miraculeux. Si miraculeux qu'il ne saurait se lover dans la durée" (page 43). le destin de l'Histoire les rattrape et les déchire.

Si le roman est très court, à peine 120 pages, il se révèle éblouissant et inoubliable. Bondissant d'une voix à l'autre, l'intrigue se noue et le sort des trois amis-amants se scelle.
François Cheng place dans la bouche de ses personnages et du choeur des propos sublimes sur ce que représente le véritable amour et l'amitié vraie pour des âmes élevées. Et d'âme il en est forcément question au vu du titre, les âmes fortes du trio dont les deux errantes, par leur pureté ont obtenu la faveur de revenir chaque nuit de pleine lune auprès de leur aimée vieillissant dans la quiétude (enfin!) d'un petit village.

Et quelle remarquable écriture! Je ressors éblouie par l'intensité de son récit et par le sublime de sa plume. C'est le premier ouvrage que je lis de cet académicien  (mais certainement pas le dernier). Ses propos, la beauté des âmes mises en présence, la force de sa narration et, j'y reviens encore, la magie envoûtante de son écriture m'ont littéralement prise à la gorge.

C'est un roman à la beauté presque douloureuse à force de pureté. Je le quitte sachant déjà que je le reprendrai. Même s'il ne me quittera pas dans l'intervalle tant sa lumière est intense et incite à réfléchir sur les thèmes abordés.
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