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Critique de souslevolcan


Voici un objet à deux visages dont on ne sait distinguer lequel est face et l'autre pile, lequel serait un essai philosophique et l'autre un roman, lequel nous intéresse et l'autre moins. Tout au long de la lecture de ce livre attachant, j'ai oscillé entre ses deux aspects, livre à tiroirs ou simple mise en scène dont le dessein ressemble plus au Banquet de Platon qu'à un livre d'Agatha Christie, mais dont le mouvement, souvent adroit et surprenant, donnent à chacun de ces deux aspects un côté indécis.
J'entends hurler ses partisans, pour qui ce texte donne à la métaphysique chrétienne une forme populaire de symbolisme un siècle avant Maurice Dantec, et qui voient en cette oeuvre le préau monumental construit au-dessus de l'école de pensée occidentale, sacralisant sa grandeur, sa souffrance et sa perfection poétique. On lit dans ce livre – qui sait d'ailleurs être surprenant, le renversement des valeurs opérant à l'intérieur est une fulgurance digne de respect - que la préoccupation principale du monde tient en la terreur qu'inspirent les anarchistes aux habitants de ce Paradis. le Mal rôde, il faut le combattre. Mais comme personne n'est réellement ce que les autres pensent qu'il est, il est possible que tout le monde ne soit que ce que les autres font de lui, y compris donc, Dieu et le Diable, et inversement. C'est clair. Bien, quand on sait que ce livre a été édité en 1908, on comprend ce que la pensée de Chesterton avait de déplacée au regard des violents courants de nationalisme qui allait projeter violemment semblable contre semblable, lui qui ne lisait dans la folie de ses contemporains qu'une opposition entre ceux qui s'inspirent des voyages et ceux qui préfèrent les destinations.
Chesterton parle de souffrance, de doute, de quête dangereuse à accomplir avant de pouvoir trouver le salut. Croit-il vraiment que l'ennemi est partout et seulement à l'extérieur ? On assiste a plusieurs retournements de situations qui fondent la philosophie des apparences, personne n'est vraiment ce qu'il est, et c'est intéressant. Mais l'oeil, le prisme par lequel est vécue cette aventure reste désespérément celui de l'innocence. Tout est extérieur. Syme, le héros, est ballotté dans son cauchemar comme le spectateur de sa propre vie, à aucun moment, il n'agit vraiment, il ne décide et ne doute de lui-même. C'est le tord de ce livre suranné, n'avoir pas su lire sur la peau des hommes cette vérité trouvée dans Platoon : « We did not fight the enemy; we fought ourselves. The enemy was in us. »
Seulement, bien que mon observation soit négative, la qualité de son écriture contrarie les regrets dûs à son propos. Ce n'est peut-être pas son meilleur ouvrage et je veux bien le croire. Car il s'y dégage une qualité narrative qui m'a souvent impressionné, principalement dans les premières cinquante pages ou j'ai vraiment cru tenir un chef d'oeuvre. Voilà le dilemme : même après son achèvement et tout ce que je peux en dire, je ne peux m'empêcher d'y penser avec chaleur et respect, c'est là sûrement le dernier tour que nous joue Chesterton : rien n'est vraiment ce qu'il y parait, même pour ceux qui veulent bien le lire.

Lien : http://souslevolcan.over-blo..
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