Contrairement au projet de la première Renaissance où l’humain était destiné à devenir meilleur par l’éducation, et le monde par des réformes sociales et politiques, la convergence NBIC nous propose une nouvelle forme du fantasme eugéniste selon lequel il existe un optimal et, en contrepartie, un ensemble de tares à éliminer ; ce qu’exprime avec une rare naïveté
James Hugues : « Si vous sélectionnez, sur catalogue, la plupart des gènes de votre enfant, cette sélection renforcerait probablement l’importance de vos liens parento-sociaux avec vos enfants. » Raisonnement pervers dans son apparente simplicité car si le catalogue des mutations à l’origine de maladies graves, donc le catalogue des « mauvais gènes », commence à exister, celui des « bons » gènes n’existera jamais.
Très probablement, il y aura quelques conséquences négatives de l’ingénierie germinale humaine qui ne peuvent être ou ne seront pas anticipées. Inutile de dire que la seule existence d’effets négatifs n’est pas une raison suffisante pour ne pas y procéder. Toute technologie majeure a quelques conséquences négatives, y compris quelques conséquences imprévues. Et il en va de même pour le choix de préserver le statu quo. Ce n’est qu’après une comparaison équitable des risques et des probables conséquences positives que l’on peut parvenir à une conclusion fondée sur une analyse en termes de coûts-bénéfices.
N’hésitant pas à piétiner les fondements de la bioéthique et les interdits de manipulation du génome humain, les transhumanistes appellent à l’ingénierie des cellules germinales et au clonage reproductif.
L’idéologie transhumaniste réhabilite le mythe d’un nouvel homme maître des éléments qui composent son corps amélioré, et d’une supra-intelligence collective capable enfin de reconnaître et comprendre un avenir qui cesse d’être incertain et surtout incontrôlé. Derrière la technophilie se cache l’espoir de retrouver cette position de maître de la Nature ébranlée par la « bande des quatre » (Darwin, Marx, Einstein, Freud).
De ce point de vue, le transhumanisme prétend qu’il existe un impératif éthique pour que les humains recherchent le progrès et l’amélioration.
L’humanité est une étape provisoire sur le sentier de l’évolution. Nous ne sommes pas le zénith du développement de la nature.
Les génétiquement privilégiés pourraient être sans âge, en bonne santé, des supers génies d’une beauté physique sans défaut… Les non-privilégiés resteraient au niveau d’aujourd’hui, mais seraient peut-être privés d’un peu de leur estime de soi et souffriraient occasionnellement de sursauts de convoitise. La mobilité entre la classe inférieure et la classe supérieure pourrait être réduite à pratiquement zéro.
En effet, l’adhésion au projet transhumaniste porte en germe la fracture qui séparera un jour prochain les Élus/transhumains qui auront été augmentés par la technique et qui auront une chance de survivre, les Déchus/humains, reste historique des Homosapiens sapiens.
Si les transhumanistes ne sont pas reconnus par la communauté scientifique et si la manipulation génétique est une fable, pourquoi faire tant d’honneur à des élucubrations peu fondées ? Cette logorrhée un peu délirante sur l’avenir post-humain devrait effectivement nous faire sourire. Toutefois, la puissance des moyens de communication utilisés doit aussi nous inciter à la plus grande vigilance et à ne pas nous contenter de balayer d’un revers dédaigneux ce qui n’est effectivement aujourd’hui qu’un fantasme.