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Critique de gouelan


Au marais, près du pont de Renteria, le héron toujours là, à l'avant de la roselière, dans sa posture aérienne et silencieuse.

Sur le chevalet le pinceau de Basilio tente de peindre les secrets de la lumière, le mystère des ombres des gestes lents, le silence qui bruisse. Il tente d'accrocher le vivant à la toile.

La chemise blanche déchirée à l‘épaule porte des traces noirâtres et le sang d'un soldat. Comme les prémices d'une autre blessure.

L'avion allemand enfante ses bombes, elles tombent de son ventre métallique sur le village de Guernica un jour de marché où les rires éclataient, comme des fleurs du mal.

Au marais, le héron cendré s'envole apeuré. Il ne comprend pas ce géant , oiseau de l'enfer venu fendre la paix, le printemps plein de promesses.

Il y a cette bicyclette couchée dans la poussière dont la roue tourne dans le vide. À ce moment de ma lecture j'ai pensé à l'image de l'homme à la bicyclette fauchée par une mitraillette, ou je ne sais plus par quel bras de malheur, dans un village ukrainien au début de l'invasion russe.
La fragilité, la vie simple et paisible face à la force sombre, écrasante, sans âme. Une image qui raconte au-delà des mots.

Puis, sur le fil du mur du couvent, Basilio semble faire le héron, en équilibre instable entre l'instant d'avant et le présent sans plus d'horizon, avec sa chemise blessée à l'épaule.

Picasso le peintre mondialement connu et Basilio, l'artiste anonyme, ont tous deux peint le bombardement de Guernica. Chacun avec sa sensibilité, l'un par les échos, l'autre par sa présence discrète et si attentive. La toile de Basilio restera invisible aux visiteurs de l'exposition, mais pourtant si réelle au lecteur et sans doute à Picasso en visite dans ce roman.

Deux témoins pour tenter d'accrocher le vivant à la toile, et la mort aussi.
Un roman puissant par sa pudeur et sa poésie. Puisse l'art raconter pour ne pas oublier, pour ne pas recommencer.



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