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Critique de Erik35


LA COURSE À L'ÉCHALOTE.

Il fallait bien que cela finisse par arriver : à force de ne plus pouvoir remettre convenablement en état leur bon vieux vaisseau spatio-temporel pour cause de disparition définitive de base arrière - feue Galaxity - et de dèche conjoncturelle, celui-ci est en rade, et pas sur la planète la plus paradisiaque qui soit. Sur Rubanis, planète déjà entrevue dans un précédent album (Les Spectres d'Inverloch), de même que l'un des principaux protagonistes de cette histoire, le Colonel Tlocq, un grand gaillard faussement débonnaire mais réellement corrompu, âpre au gain et assoiffé de pouvoir - il se proclame lui-même "chef des traîtres") qui va, par l'entremise des irremplaçables Shingouz - toujours plus ou moins dans les coups foireux, pourvu que cela puisse rapporter de l'or, des diamants ou quelque monnaie en cours dans l'espace - confier une mission très délicate à nos (ex) agents spatio-temporels préférés.

Tlocq cherche à savoir quel mystère plane sur le cinquième et ultime cercle formant la structure étatique - si l'on peut ainsi l'exprimer -, politique et économique sur lesquels repose la société hyper-urbanisée de Rubanis : le fameux "Cercle du Pouvoir" qui semble connaitre d'étranges difficultés depuis quelques temps.

Jamais avares de rencontres aussi improbables que pimentées - sous les créatifs auspices de Pierre Christin au scénario et de Jean-Claude Mézière au dessin - nos aventuriers des temps présents ou futurs vont ainsi croiser une femme au caractère rien moins que trempé, aussi sexy que dénuée de morale, Na-Zultra, la "méchante" de l'histoire, au destin compliqué et qui éprouve surtout une grande soif de prendre sa revanche sur un monde très machiste dont ses origines sociales l'avaient a priori exclues avant qu'elle parvienne à s'en extirper, et peu importent les méthodes... Mais Valérian et Laureline vont aussi tomber - presque littéralement - sur un jeune garçon nommé Strak's, mi chauffeur de taxi-limouzingue, des voitures volantes capables de se faufiler partout dans les trois dimensions, et surtout dans des lieux dangereux (toute ressemblance avec le 5ème élément de Luc Besson n'est absolument pas fortuit), mi-voyou aux rêves de grandeur pas si démesurés que cela, finalement...

Renouant dans cet album avec un propos volontairement politique, Pierre Christin, l'ancien marxiste revenu d'un peu tout, nous donne, dans ce qui pourrait ressembler à une véritable dystopie, une vision aussi loufoque que désabusée de ces années 90 débutantes (l'album est de 1994) où l'argent est décidément plus que jamais roi, où des "J6M" (souvenez-vous : Jean-Marie Messie, Moi-Même, Maître du Monde) commencent - ce n'est, hélas, que le commencement - à faire la loi, pour ne pas dire les lois, du haut de leur splendeur et de leur morgue financière et industrielle, un monde qui s'est furieusement converti aux préceptes ultra-libéraux d'une certaine Dame de Fer et d'un ancien acteur de western américain, un monde dans lequel Laureline peine à trouver sa place et où Valérian, plus pragmatique sans doute, moins idéaliste certainement, s'en sort mieux... dans la médiocrité.

Après quelques albums en demi-teinte et où le couple de créateurs semblait chercher un second souffle après s'être quasiment sabordés en faisant disparaître Galaxity, voici donc un opus foisonnant, envolé, très rythmé mais aussi riche de réflexion sur le monde, le pouvoir, l'argent, etc. Sans compter que le dessin de Jean-Claude Mézière semble parvenu à un compromis entre les planches très travaillées des meilleurs albums du début et ce trait grossier des quelques précédents. On en redemande !
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