Ce que Paris consomme de denrées est énorme ; mais plus surprenant encore est ce qu'il dévore moralement, ce qu'il anéantit d'intelligences, ce qu'il engloutit de coeurs et d'âmes !
Minotaure, Minotaure sans cesse affamé, quand seras-tu lassé de ces mets saignants qui sont des douleurs, des dévouements, des vertus et des vices, des héroïsmes et des crimes ? Quand donc sera-t-elle fatiguée, ta gueule terrible, quand donc rassasié, ton boulevard ?
Ah ! le boulevard, voilà le grand danger de Paris, le gouffre où l'on tombe, le fossé, l'ornière !
(...)
Et par le boulevard, vous entendez bien que je veux seulement dire : un coin du boulevard, vous savez lequel. Ce coin-là est sinistre. Il est mortel. Une fois qu'on a pris l'habitude d'y aller, on y revient, et l'on n'en revient pas.
Le titre du présent volume indique suffisamment ce que j'ai essayé de peindre ; peut-être paraîtra-t-il un peu ambitieux. Je n'ai pas la prétention d'avoir montré toutes les victimes de Paris, mais il faut savoir se borner. Entre tous les papillons qui voltigent, avec leurs mouvements saccadés, autour de la flamme qui les attire pour les consumer, j'en ai choisi quelques-uns et les ai piqués, comme j'ai pu, sur ma planche d'entomologiste. Hélas ! il y a tant d'espèces d'insectes et de tant de papillons !