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Critique de MD68


BASQUIAT, UNE VIE EN GRANDS FORMATS : peinture, créativité tous azimuts, amour, drogues, années 80.

C'est les dernières années de la vie du peintre que Suzanne,"Vénus" comme il l'appelait, nous invite à partager au plus près de l'os avec comme toile de fond, le bouillonnement propre au New-York de cette période, le racisme et les débuts de la procession morbide du sida.

Et c'est ce qui fait la puissance de ce témoignage, et le rend passionnant. Il montre l'énergie qui habite et nourrit le processus créatif au quotidien et ses ramifications avec la vie, (passée, présente, sordide ou pas), les personnes fréquentées et qui souvent l'ont aidé : Wharol, Diego Cortez qui l'a exposé pour la première fois, Madonna ... Cette proximité avec Basquiat nous laisse entrevoir cette magie (noire parfois), plus que n'importe quelle biographie.

(DE)DOUBLEMENT DES PERSONNALITES

"Tout était symbolique pour lui. Sa façon de s'habiller, de parler, de penser, qui il voyait. Tout devait être prolifique, sinon, pourquoi le faire et son attitude était toujours ironique. Jean ne cessait de s'observer de l'extérieur et d'en rire"

Des observations générales, des souvenirs de Suzanne sont exposés et distanciés à la troisième personne. Ils sont complétés par des textes écrits comme un journal intime avec italique et à la première personne.

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Jean -Michel, lui aussi a une personnalité très complexe (une seule ne lui suffit pas). Tantôt monstrueux et tyrannique, tantôt protecteur et ange de douceur ou tout ça dans un autre ordre. Leur vie a peut être été marquée du sceau de la violence vécue dans leur enfance.

Pendant une période, elle restera sous une table "Comme une petite chatte qui déniche une cachette. de là, elle regarde Jean-Michel peindre, dormir, se droguer...Il prend un livre, le journal ou ce qui lui tombe sous la main. Il trouve un mot ou une phrase et le peint sur sa planche ou sa toile" Quand Suzanne geint, JM dit : "Ta gueule, Vénus. Je sais ce que c'est que d'être attaché comme un animal avec un bol de riz par terre. Un jour, j'ai compté mes bleus et j'en avait trente deux"

La passion partagée par ces deux enfants terribles, à n'en pas douter, est aussi au centre du livre, mais traversée par l'impossibilité d'avoir une communication "normale" et l'addiction de plus en plus obsessionnelle et fatale de J.M.

Mais tout aboutit à la création de graffes, musique et peintures, 24/24, menée dans une profusion quotidienne de cocaïne puis d'héroïne. Là aussi, la démesure rend Basquiat extra-ordinaire. Au final, la notoriété récoltée ne lui apportera rien, au contraire.

"Il était devenu si célèbre que tout était très tendu entre nous. On l'appelait du monde entier pour le porter aux nues. C'était très triste parce qu'apparemment, cela ne lui faisait aucun plaisir... Il détestait les critiques d'art qu'il qualifiait de "larves".

La fin de cette histoire d'amour ne sera pas brutale, mais sera le fruit d'un long processus entamé par Suzanne pour reprendre le contrôle de son existence. Elle entamera une nouvelle vie après avoir mené des études pour devenir psychothérapeute et oeuvrer à la guérison d'artistes souffrant d'addiction tout en écrivant.

Je ne peux m'empêcher de faire le rapprochement avec l'enthousiasmant livre de Patti SMITH "Just kids" décrivant son arrivée à New York dans les années 60, le déploiement de ses talents en même temps que ceux de Robert Mapplethorpe et leur relation amoureuse puis amicale très forte. Dailleurs, je vais prochainement chroniquer "M. Train" sur une autre période la vie de la poétesse, plus récente.

A la fin du livre, Suzanne CLEMENT se rend avec quelques amis rescapés de la drogue et du sida à la magnifique exposition de 2010 organisée à la Fondation Beyeler de Bâle et se rappelle que les graffeurs de New York disaient entre eux " Allons écrire" ou alors "Tu es écrivain ?".
Lien : http://litterature.calice68...
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