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Critique de Erveine


Je découvre Coetzee et j'aime. Beaucoup de vraisemblance dans ce livre. David Lurie enseigne à l'Université du Cap. Il lui arrive bien de succomber à la tentation pour s'accoupler avec quelque élève qui lui confère une certaine suprématie et il en use. Est-ce mal ? Est-ce bien ? Des escapades qui durent peu jusque là, c'est-à-dire, jusqu'à la dernière. Celle-ci, il ne sait pas comment la conclure, il n'en a plus la maîtrise et il se perd. C'est la passion qui l'emporte, le désir qui commande à la raison. Puis, sans qu'il sache bien pourquoi Mélanie l'accuse. Elle porte plainte contre lui. Un conseil d'administration se charge de recueillir son témoignage en exigeant de lui qu'il se soumette, qu'il fasse des excuses publiques, et même qu'il exprime son repentir... Mais David refuse. Fierté ? Roublardise ? Dignité ? Il s'accuse ! Oui ! il est coupable et le revendique haut et fort mais il ne veut pas s'excuser. Non ! Il ne se livrera pas à cet exercice d'exprimer ses regrets publiquement et de se confondre en excuses, même s'il perd son poste, même s'il perd ses droits, son salaire... David estime que ses agissements relèvent de la sphère privée, même si Mélanie a 20 ans et lui 52. Il revendique son droit au plaisir, au désir, même s'il est vieux, même s'il n'est plus un prétendant au renouvellement de l'espèce, à moins que d'être châtré comme il dit et que la force d'attraction s'éteigne et le libère, enfin !
C'est après, tout ce désordre administratif qu'il part chez sa fille, Lucy, pour se ressourcer, se réfugier dans une ferme isolée, une petite exploitation qu'elle partage avec Pétrus, l'Africain. le désordre et le désert affectif qui l'habite le poussent à se surpasser dans son rôle de père tandis que Lucy est une femme émancipée, forte et fort différente de l'image que son père a construite inconsciemment pour elle, sur son devenir de femme et quand elle est à la campagne ce qu'il est à la ville. Puis, c'est l'agression. Trois hommes s'introduisent dans la ferme et contre toute attente Lucy reste passive. Elle refuse de porter les faits réels à la connaissance de la police. Il se creuse alors un fossé entre le père et la fille. Lucy n'entend pas ses recommandations. Non ! Elle ne quittera pas la ferme, même si une blanche européenne n'a pas en ces lieux d'après la colonisation, un régime de faveur. Elle, ce qu'elle veut, c'est se fondre dans le paysage, avec ses productions de légumes, ses fleurs et ses chiens. C'est ici qu'elle veut vivre. David est déconcerté. Pourtant, sans y trouver d'explication plausible, il se découvre peu à peu une sensibilité envers les animaux. Et même auprès de Bev, une femme de sa génération qui gère une sorte de S.P.A, du moins ce qu'il en reste après un passé florissant. Une femme que tout d'abord il trouve moche et que la compassion exaspère, envers ces animaux, ceux-là même qu'elle est amenée à euthanasier, parce qu'ils sont trop nombreux, parce qu'il faut bien que quelqu'un le fasse. Puis, il y a ces deux moutons, des moutons qu'il voudrait voir paître au loin, bien plus loin, les deux caraculs que Pétrus destinent au festin lors d'une fête prochaine. Des moutons qu'il mangerait bien à condition qu'ils soient anonymes et dont il boudera l'assiettée. Une fête à laquelle se rend un des agresseurs. Un agresseur que Lucy se résoudra à ne pas poursuivre cependant puisqu'il fait partie de la famille de Pétrus. Pétrus qui se propose de la prendre sous son aile et même plus, de la marier, tandis qu'il a déjà deux femmes. Et Lucy qui confie à son père son intention d'accepter sa protection. Et son père, sidéré ! Et David qui se libère du dernier lien, ce chien qu'il aime, un chien qui l'aime aussi et qui le suit partout, celui au postérieur atrophié et que personne ne voudra adopter, le mélomane, celui qui l'entend jouer et soliloquer avec Byron.
– « Tu ne veux pas lui donner encore une semaine » lui dit Bev.
– « Non ! » Il doit se libérer pour demain. Demain qui renaît de ses cendres, demain qui le porte vers sa descendance....
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