AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de soniamanaa


"Méfiez vous de tous ceux en qui l'instinct de punir est puissant. [...] Dans leur visage, on voit parler le bourreau et le chien policier" C'est par cette citation de Nietzsche que s'ouvre un autre roman, celui de Jim Tully, Ombres d'hommes, un roman de prisons et d'errance. Si j'utilise ce préambule, c'est parce que les deux oeuvres suivent les pas de clochards célestes et que tout au long de ma lecture, ils ont dialogué par delà les pages.
Coetzee maîtrise l'art de l'ellipse. de son héros, il ne dit pas grand chose. Homme frustre, un peu simple, affublé d'un bec de lièvre, il a grandi en institution, sa mère supportant mal cet enfant différent. C'est pourtant pour cette mère que Michael K prend la route afin de la ramener plus au Nord, dans la ferme où elle a grandi et où elle souhaite mourir. Elle n'y parviendra pas, décédant dès les premiers jours de voyage.
Michael poursuit seul le chemin. Dans le pays en proie à la guerre, militaires et patrouilles sont partout. Il opte pour les voies de traverse, hantées par d'autres spectres qui, comme lui, marchent parce que s'arrêter supposerait qu'on est arrivé quelque part... Vite dépouillé de son pécule et de ses biens, il se déleste au fil des pas des attributs superfétatoires de son humanité. Replié sur sa part animale, il goûte une liberté nouvelle, nourrie de ce qu'il trouve quand il en a besoin.
Pour quelques graines de potirons, il se fera pourtant jardinier. Sublimes pages où l'homme abreuve nuit après nuit, une à une, dans le secret, les précieuses semences dont la pousse lui est une joie renouvelée quotidiennement.
Arrêté, il est interné dans un camps de rééducation dont il s'échappe vite, refusant la pitance offerte tant l'appel du large est fort pour ce funambule du vide. Il veut la terre pour lit, le ciel pour dais, et le vent pour unique interlocuteur. Et de la faim, il saura se passer.
C'est un quasi squelette qui est à nouveau emprisonné sous la férule d'un médecin militaire humaniste qui échouera à le nourrir. "Michael qui rêve de couvrir le désert de fleurs de potirons fait partie de ces gens trop occupés, trop stupides, trop concentrés pour écouter tourner les roues de l'histoire." Bien sûr, Michael s'évade encore...
C'est une oeuvre qui tutoie l'universel, opposant deux forces irréconciliables. D'un côté, la société humaine, souvent belliqueuse et manichéenne, et de l'autre un être qui a décidé une fois pour toute de ne rien décider.
Un moment de lecture exceptionnel...
Commenter  J’apprécie          134



Ont apprécié cette critique (13)voir plus




{* *}