On commence un portrait sans connaître le modèle, quand on a fini, on connaît le modèle mais le portrait n'est plus ressemblant
Edouard Vuillard
Dire qu'une chose est belle est simplement un acte de foi, non un mesurage avec une quelconque mesure.
(Vuillard, journal, 2 avril 1891)
Au centre focal de son univers, il a de manière définitive, installé sa mère, qui est son sujet de prédilection absolue. Au cours de sa vie, il l'aura représentée dans environ cinq cents peintures. Il serait difficile de se figurer une mère qui fasse plus d'efforts pour comprendre son fils, le seconder le plus discrètement possible, assister dans l'ombre à la moindre péripétie de son évolution créatrice. ("L'idole maternelle", page 50)
Ce petit paysage leur donna le signal d'une liberté nouvelle, d'un art régénéré, ouvert à l'imagination, grâce à laquelle, au lieu d'être de simple copie, il pouvait devenir déformation subjective de la nature.
S'il y a bien une évolution dans sa sensibilité et surtout dans sa manière, elle n'est en aucun cas rectiligne. Ni révolutionnaire ni extraverti, ni peintre du dimanche, Vuillard présente un itinéraire très original au cœur de la tradition moderne.
L'existence créatrice d'Edouard Vuillard est des moins flamboyantes. sa vie parait vouloir contourner à tout moment l'anecdote et se préserver du déploiement tapageur d'une stature héroïque avec sa série obligée de défis scandaleux. les seules péripéties qu'elle expose sont de rares voyages limités à l'Europe, de courtes obligations militaires en 1914 et une fin de carrière couronnée par l'Entrée à l'Institut.
Il n'y a pas de rupture dans la manière de Vuillard après 1900 mais plutôt confirmation et accomplissement de certaines tendances. Il entre dans la galerie Bernheim jeune devient un portraitiste recherché, ce qui lui permet d'assurer son confort matériel. Son cercle étroit d'amis reste toujours celui des ex-nabis, mais viennent s'y agréger des personnalités du tout paris des arts, de la littérature, de la finance, du cinéma.
La vieillesse de vuillard laisse donc une très grande place à l'approfondissement psychologique, à l'introspection morale plus qu'au jeu des intrications texturelles auxquelles il se livrait autrefois.
Entre 1920 et 1940 Vuillard est le portraitiste le plus célèbre de Paris, qu'une clientèle bourgeoise et aristocratique s'arrache.
Son style est à présent beaucoup plus abouti, plus fini, ses détracteurs diraient beaucoup plus léché.