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Critique de SergentPoivre


Je pensais que Wilkie Collins ne me réserverait plus aucune surprise. Ayant déjà lu les quatre romans que les critiques et les lecteurs tiennent pour les seuls à être exceptionnels ou véritablement novateurs (Armadale, Sans nom, Pierre de Lune et La Dame en blanc), je n'étais fait à l'idée qu'il ne me restait plus à lire que des oeuvres mineures, dont le principal attrait résiderait probablement plus dans le voyage dans le temps, au coeur de cette Angleterre victorienne qui me captive, que dans la qualité de l'intrigue ou l'élégance de l'écriture. Et il semblait effectivement en aller ainsi car, à l'exception d'un Mari et femme de très bonne facture, je ne croisais plus que des romans que l'on pourrait, au mieux, qualifier de corrects (Passion et repentir, Secret absolu, Seule contre la loi).
Et puis j'ai acheté Basil, dont je n'attendais guère plus que quelques heures de divertissement, un peu de crachin, des trottoirs mouillés et un nombre raisonnable de nappes de brouillard opaque. Mais que je n'hésiterai pas, maintenant que je viens d'en tourner fort à regret la dernière page, à placer aux côtés des tout meilleurs romans de Wilkie Collins.

Le personnage principal de cette très sombre autobiographie est certes d'une naïveté confondante et l'on a plusieurs fois envie, bien que ce soit inutile puisqu'il nous conte des événements passés, de le secouer comme un prunier pour le remettre sur le chemin de la raison. On a envie de lui hurler dans les oreilles, non sans accompagner l'admonestation de quelques noms d'oiseaux bien sentis (« Tire-toi, triple buse ! »), qu'aimer une femme avec une telle intensité et une telle droiture sur la seule foi de son joli minois et du gracieux balancement de ses hanches, même si cette dernière était la plus franche des créatures – ce que Margaret n'est pas, ne peut mener, au mieux, qu'à la déception, à l'amertume et à l'échec.
Mais voilà, Basil est amoureux, naïf et droit. Très amoureux, très naïf et très droit. Irrémédiablement amoureux, irrémédiablement naïf et irrémédiablement droit. Et Margaret est une manipulatrice, une intrigante de bas-étage. Et Robert Mannion, qu'amine un incurable désir de vengeance, est un homme modelé par une haine qui plonge ses racines dans un épouvantable passé, un homme aussi dur et inexorable que la mort qu'il finit par promettre à Basil

De la sensualité (l'auteur use notamment des sons de manière magistrale), de l'inconvenance (pour l'époque, s'entend), de la fourberie, de la mesquinerie de boutiquier, de l'arrogance d'aristocrate, de la fraternité, des cauchemars fiévreux, du déchirement moral, de la tension, un suspense qui tient le lecteur en haleine jusqu'au dernières pages, une langue d'une exceptionnelle beauté et, oui, un peu de crachin, des trottoirs mouillés et un nombre raisonnable de nappes de brouillard opaque. le pied total, quoi !
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