Bien sûr qu'il est débranché, Germain! Il flotte entre deux eaux, celles du sein maternel dont instinctivement il cherche la chaleur et celles de ses larmes d'homme, réservoir aux vannes enfin ouvertes. Entre les deux, il renoue les fils cassés de sa vie. Tâche essentielle et intime entre mémoire et amnésie, flashes et ralentis, euphorie et douleur. Pour cela, il s'est donné la permission de se couper du monde.
Michel enlace sa femme, lui rappelant d'un geste discret qu'il existe lui aussi et qu'il a besoin d'elle. Ses derniers mois de vie active, dans une entreprise qui ne ressemble plus à celle qu'il a connue, pèsent lourdement sur ses épaules.
Ses doigts s'apprivoisent peu à peu ,retrouvent le fil du chant ,noires liées ,croches enlevées ou appuyées .Avec des hésitations ,ils réapprennent à détacher la voilure de la mélodie qui s'appuie sur une broderie de triolets en main droite et des octaves affirmés en main gauche
- Tu es entré dans ton tableau. Si je t'en crois, tu as déchiré le rideau. Tu vas à la rencontre de la Lumière dont tu soupçonnais la présence. Un jour, je vous rejoindrai, toi et maman, mais pas tout de suite. J'ai encore tellement de belles choses à vivre ici. Je sais que tu ne seras jamais loin, de toute façon.
Quand tu fais la muette ,je sais ce que ça veut dire. Que je te bouscule là ou tu n'as pas du tout envie de l'etre. Tu m'entends mais ton cœur entend autre chose que tu n'oses me dire.
Il est devenu sans age ,une sorte de bébé vieilli qui ne manque pas d'une certaine sagesse.Il est libre dans sa tete.