Commences-tu à comprendre que les livres nous renvoient sans cesse à nos histoires personnelles, qu’ils sont comme des éponges, et les absorbent ? Tous les livres offrent cette possibilité, tous sont des machines interprétatives douées d’une conscience : la nôtre. C’est cela la grandeur des livres : ils réclament des lectures différentes, plurielles, s’ouvrent au moyen de clés que nous devons découvrir, ou que parfois la fortune nous met entre les mains au moment où nous nous y attendons le moins. Ils ne se livrent pas à tous, et surtout pas à ceux qui ne font pas l’effort nécessaire pour les pénétrer, ou y sont inaptes.
Il en va toujours ainsi avec les grands livres : on a la sensation de pouvoir tout saisir, tout isoler, mais on s’aperçoit que ce n’est pas possible.
[…] en littérature les conclusions n’existent pas, et rien ne se termine jamais. Tout demeure ambigu, tout continue éternellement sa course. Un livre n’est jamais deux fois le même, et c’est pourquoi il est parfois plus stimulant de relire que de découvrir les livres nouveaux.
La littérature est un monde en soi, seulement analogue au réel, et où les livres se parlent entre eux ; pour y entrer, il faut faire un saut dans l’inconnu, de l’autre côté des choses, traverser le miroir. Et ensuite, le retour est difficile, car les personnages que tu auras rencontrés continueront à te parler, te conseiller, te faire prendre des décisions.
Parmi tous ses pouvoirs, la littérature a aussi celui de rendre l’erreur utile, et même nécessaire à notre compréhension. Mais surtout, la littérature, la vraie, ne considère pas ce genre de divergences comme des erreurs.
[les livres] n’ont pas besoin du monde, c’est le monde qui a besoin d’eux.
On nous apprend depuis des générations à nous incliner devant l’autorité culturelle établie. Qui est faite de chefs-d’œuvre indiscutables, et indispensables à nos esprits. Et qui s’incarne dans des auteurs à révérer sur leurs piédestaux sous peine d’hérésie.