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Critique de fuji


Dans ce huitième roman, Cécile Coulon nous conte une histoire empreinte de la littérature qui traverse les siècles mais elle l'habille d'accent chabrolien, et la nimbe de sa poésie.
Fin XIXe siècle Aimée Deville, 18 ans, passe une jeunesse insouciante avec ses parents et son cousin. Mais les parents vieillissants souhaitent la voir épouser un bon parti.
Candre Marchère a un vaste domaine au coeur de la forêt d'Or dans le Jura à une trentaine de kilomètres des Deville. Il est jeune environ 25 ans, mais déjà veuf. Sa femme meurt quelques mois après leurs noces.
Lorsque Candre fait la cour à Aimée, celle-ci remarque bien qu'il parle peu et ne la regarde pas franchement.
Elle sait que ce mariage rassurerait son père, elle accepte donc.
Elle est « livrée » à son mari sans mode d'emploi de ce qu'est la vie conjugale. Elle n'a comme image de l'accouplement que celle de l'étalon montant la jument, et cela lui a laissé une image effroyable.
Candre se montre patient voire respectueux, il essaie de faire comprendre à son épouse qu'elle est chez elle dans cette vaste demeure, dirigée par Henria, la domestique de ses parents qui a élevé Candre lorsque sa mère est morte brutalement. Henria a eu la tendresse maternelle comme celle qu'elle a pour son propre enfant Angelin.
Aimée peine à trouver ses marques, Candre est un solitaire et un homme pieu, il n'a visiblement pas besoin d'autre chose que d'une femme et d'une future descendance.
Toujours désireux de plaire à son épouse il va lui octroyer un professeur de flûte Emeline qui viendra de Suisse tous les jeudis pour une cours particulier.
Mais Aimée par divers avertissements que lui envoient son corps et son esprit, prend conscience que le domaine Marchère et sa luxuriante nature se referme sur elle, telle une pieuvre sur sa proie.
Le domaine Marchère étend ses tentacules, elle y suffoque, tout lui paraît mystère. Elle a besoin de savoir qui était la première femme de son époux et pourquoi il n'en parle jamais. Il finit par lui faire quelques confidences mais cela n'éclaircit rien.
La vie pèse, oppresse et enferme.
Qui est son mari ? Que cache ce domaine ? Et pourquoi ne désire-t-elle pas son mari ?
Naïvement elle avait pensé que cela viendrait naturellement…
« La jeune femme se maintint au bras de son mari comme à la rambarde d'un navire : la forêt l'étouffait, les fleurs l'agressaient. Tout l'oppressait. Sa peau sous sa robe gonflait. Il lui semblait que la vie humaine avait déserté ces terres, que les larges étendus de son enfance au clos Deville s'éloignaient. de là où elle se trouvait Aimée ne voyait que des bois, serrés, du vert et du noir jusqu'à l'horizon, même la route engloutie à grands sabots paraissait invisible. »
Je n'en dirais pas plus.
J'ai aimé le décor somptueux et venimeux car le lecteur ressent combien l'auteur est attachée à la Terre et à la France profonde.
Chaque prénom répond à une personnalité bien dessinée, j'ai eu beaucoup plus d'empathie pour Candre que pour Ailée, je crois que je ne suis pas politiquement correcte.
J'ai aimé que l'auteur joue avec toutes les nuances de noir ce qui renforce l'effet sur nos nerfs. Elle distille les indices jusqu'au final.
Lisez et découvrez si Candre est le cousin de Barbe bleue.
J'aime tout particulièrement ses métaphores, notamment celle-ci qui m'a beaucoup fait rire tellement j'imaginais ce fossoyeur :
« […] son ventre faisait un comptoir à ses coudes et sa tête tenait sur ses épaules sans qu'on discerne le début d'une nuque. »
©Chantal Lafon

Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
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