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Critique de Fifibrinda


Murdo, le yéti du livre, est le narrateur/compilateur de ce recueil, collection de rêves.
Au croisement des listes et des cabinets de curiosités, cet album nous invite au rêve, mais aussi au questionnement, à la méditation, au dialogue. Il permet de s'interroger sur soi, sur le monde, sur les rapports entre les deux. Il suscite l'envie d'écrire, de dessiner, de d'exprimer. Il montre que rien n'est trop bizarre, que tout peut avoir un sens, que les rêves nourrissent la vie.
Les textes d'Alex Cousseau sont tour à tour oniriques et déjantés, existentiels (« on me dit que les yétis n'existent pas. Et pourtant je suis là. »), absurdement pragmatique (la cravate fluo), potaches (le miroir), poétiques (le pull poème). L'auteur a des trouvailles magnifiques (voyager en arbre), frôle l'Oulipo et les calligrammes (le château de sable, la chanson), convoque d'illustres prédécesseurs (« J'ai toujours rêvé de faire tourner la planète entre mes mains. Ce serait en épluchant une orange… » appelle Eluard). le lecteur passera d'un rêve à l'autre, les enfilant comme les perles qu'ils sont, ou bien puisera dans ce livre aux trésors au gré de ses envies, toutes les lectures sont possibles. Chacun s'y trouvera en terrain familier, comme on se souvient d'un rêve le matin venu, avec quelques détails, des bribes de sens, des sensations.
L'illustration d'Eva Offredo est économe de moyens, sobre, stylisée, et repose sur trois couleurs uniques (mais pas primaires !). Et pourtant ! quelle minutie (quadrillages, rayures, pois et poils…), quel humour (la chair de poule en téléphonant à un fantôme, les cactus en maillot de bain…), quelle poésie (porter la rivière comme une vaste écharpe…) !
Sans oublier la dégaine de notre yéti, qui n'a pas grand'chose à voir avec Big Foot ou le Ranko d'Hergé, mais plutôt avec … ? Sa tête évoque irrésistiblement les tasses à deux anses destinées aux bébés (ouioui, j'assume !), son corps est un mélange totalement déséquilibré de bras/tentacules et de petites jambes un peu ridicules par rapport à son torse massif, vêtu de manière à symboliser le rêve du moment… C'est tout le génie de l'illustratrice : ce yéti qui n'est censé exister que dans les livres ne ressemble pas aux autres yétis. Cet album le fait exister et, tant qu'à faire, lui donne une identité graphique différente mais parfaitement reconnaissable, quel que soit le costume endossé dans son rêve. Ainsi, un être imaginaire peut aussi échapper aux règles et classifications, s'affranchir des normes imposées aux créatures de son espèce et incarner une totale liberté, ouvrir toutes les possibilités, autoriser tous les imaginaires. Et, si les rêves sont impossibles, rien n'est impossible en rêve.
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