Tout a commencé par un autre roman, Les trois vies d`Antoine Anacharsis, où pour sa troisième vie mon personnage faisait une escale par Valparaiso avant de revenir là où il est né, près de Madagascar. Pour le faire passer de l’océan Pacifique à l’océan Atlantique, je le faisais alors traverser rapidement le continent sud américain au dix neuvième siècle. Mais en faisant des recherches sur cette époque et ce continent, j’ai découvert qu’il y avait là matière à un autre roman. C’est devenu Le fils de l`ombre et de l`oiseau.
Je n’écris pas de plan ou de scénario, je ne sais pas ce qui va se passer. Même quand je place des balises pour me repérer, elles ont tendance à se déplacer. Je préfère me laisser porter par mes recherches, par mes personnages, par la vie. Pour ce roman, entre les premières idées et le point final, il s’est passé presque trois ans. J’ai besoin de ce temps pour écrire. Je me perds, je fais du hors-piste, j’expérimente, je rate beaucoup, et j’avance au ralenti mais c’est une vraie aventure. Je suis le premier surpris par le destin de mes personnages, et c’est un plaisir immense.
Une vie sans rêve est triste à mourir, non ? Il me semble que dans les rêves, on trouve cette curiosité, cette étrangeté, cet émerveillement, cette poésie, cet élan dont on a besoin tous les jours. Je me nourris des rêves pour écrire des fictions. La réalité m’intéresse tout autant, mais entre les deux je ne choisis pas. Disons que je suis comme un pagayeur sur son kayak. Un coup je rame à droite, un coup je rame à gauche, un coup dans les rêves et un coup dans la réalité. Si je ramais du même côté, je finirais par tourner en rond.
C’est une envie que beaucoup d’entre nous partagent, il me semble. S’envoler, flotter dans les airs, faire l’oiseau, ça me parle énormément. Les avions, pas spécialement, je n’ai pas choisi l’époque pour ça. Mais les débuts, oui. Les débuts de l’histoire de l’aéronautique, ce sont d’abord des hommes qui font tout pour réaliser des rêves un peu fous, et là je m’y retrouve.
L’idée, c’était de suivre plusieurs générations sur un siècle. Voir ce qui se transmet (de la grand-mère au père aux petits-enfants). Les souvenirs, les rêves, les faits. Ce qui se répète, et les ruptures. Ce qu’on a envie de croire, et ce qui se transforme. Comment, par le récit, la réalité peut être soulevée et devenir légende.
Ah oui alors ! En tant que lecteur tout autant qu’en tant qu’auteur, j’adore me balader à la frontière. Dans l’imaginaire, cet espace où coexistent le réel et l’irréel.
Ce qui me plaît, c’est l’aventure dans tous les sens du terme. L’aventure de l’écriture qui ne ressemble pas à un voyage organisé. Partir sans savoir, sans connaître, parfois même sans objectif précis. Et découvrir, apprendre, se laisser surprendre.
Il y en a beaucoup. Je me rappelle surtout de mes lectures de lycée. La découverte de Franz Kafka, de Samuel Beckett, du William Faulkner de Tandis que j`agonise, de la folle et douce écriture de Richard Brautigan, et de quantité de poètes qui m’ont donné le goût des mots. Pas forcément des auteurs catalogués «jeunesse», donc.
Je n’ai jamais eu ce sentiment, parce que je crois qu’on peut essayer d’écrire humblement et avec exigence, mais sans se prendre pour tel ou tel auteur exceptionnel. J’écris sur mon petit bonhomme de chemin.
À quinze ans, j’ai commencé un cahier où je note toutes mes lectures (le titre, le nom de l’auteur, le mois et l’année où je l’ai lu). Et le premier livre qui figure sur ce cahier est un de ceux qui m’a marqué, Les Oiseaux, de Tarjei Vesaas.
Je crois que c’est justement Les Oiseaux.
Aucune honte ! Il y a plein de classiques que je n’ai jamais lu, et tant pis ! Il y a tant et tant de livres à lire (et pourtant je lis énormément), une vie ne suffit pas...
Des perles, j’en ai tout un sac, alors c’est difficile de choisir ! Dans mes dernières grandes émotions littéraires, disons Annabel de Kathleen Winter.
Aucune idée. Je préfère parler de ce que j’aime que de ce qui me déçoit.
Fétiche, non. Mais je peux répéter celle que j’ai mise en exergue du Le fils de l`ombre et de l`oiseau, elle est de Jim Harrison dans un recueil de poèmes qui s’intitule Théorie et pratique des rivières : «La tête est une ancre de nuages / que les pieds doivent suivre. / Voyagez léger, dit-il, / ou ne voyagez pas.»
Cet automne j’ai dévoré plusieurs nouveautés grâce à ma compagne qui est bibliothécaire. Parmi mes préférés, Le fils de mille hommes de Valter Hugo Mãe, Un travail comme un autre de Virginia Reeves, Sur cette terre comme au ciel de Davide Enia, et Voici venir les rêveurs d’Imbolo Mbue. J’ai aussi découvert Susan Fletcher, avec Un bûcher sous la neige. Et actuellement je suis en train de lire Le garçon de Marcus Malte Malte.
Cette semaine, la librairie Point Virgule vous propose une sélection de romans destinés à la jeunesse. - Monstres, Stéphane Servant & Nicolas Zouliamis, éditions Thierry Magnier, 15,80 - Bonaventure et compagnie, Alex Cousseau & Charles Dutertre, éditions du Rouergue, 13 - La maison des mots perdus, Kochka, Flammarion jeunesse, 13
Sur quelle île se déroule le début de l'histoire ?