Je livrai un combat mortel avec moi-même: Dieu et Satan se disputèrent mon âme pendant trois heures. C'est Dieu qui vainquit, mais-il me reste un doute-lequel des deux était Dieu ?
Une fois qu'on a éliminé l'impossible, la solution qui reste, aussi improbable soit-elle, est forcément la bonne;
La Kabbala denudata… C’est un grimoire de magie noire, monsieur l’inspecteur. Il y a des gens qui tueraient père et mère pour le posséder.
La mode des jupes longues et étroites les obligeait à faire de petits pas précipités qui agitaient leur joli corps de partout. Charmé par cette vision, le jeune homme paraissait faire sien le mot de Samuel Johnson : « Qui n’aime plus Londres, n’aime plus la vie. »
Son regard de prédateur était adouci par des cils très longs.
Ce dandy n’est pas journaliste, songea l’inspecteur. Peut-être l’un de ces riches oisifs qui se délectent des faits divers sanglants en toute perversion ?
Allez-y, gent masculine ! Je les connais vos slogans et vos réflexions de mâles bornés : « La politique n’est pas une affaire de jupon », « Les femmes ne seront jamais des hommes », « Si les femmes en avaient, ça se saurait »…
Vivre en reclus sur la terre des Gaëls ne m’empêche pas de rester en contact avec le monde des vivants… Et aussi celui des morts, comme vous devez vous en douter… À propos de morts, j’ai appris le décès de lord Halifax, cet ennuyeux politicien et franc-maçon risible qui n’avait pour toute qualité que de collectionner les livres de magie, comme d’autres accumulent les vieilles pièces de monnaie, les armures ou les boutons d’uniformes militaires.
S’il se moquait bien des simagrées des mystagogues, restait insensible au spiritualisme et ne croyait pas au surnaturel, il savait se montrer convaincant auprès de ses dupes, pratiquant avec aisance le jeu de l’adepte qui « en dit peu » et qui laisse entendre qu’il « en sait beaucoup ». C’était chose facile car, venant en réaction contre le scientisme triomphant de ce début de XXe siècle, l’ésotérisme suscitait partout un vif engouement.
Aujourd’hui, l’art de la provocation, le dandysme agressif et la vie sexuelle débridée de ce mage de trente-neuf ans faisaient le bonheur des journaux à scandales.
Elle avait vingt et un ans, comme moi, mais traînait avec des drôles de femmes, des femelles qui veulent être des hommes. Des suffragettes, que ça s’appelle… Attention ! Mollie était une fille instruite qui voulait devenir institutrice. Seulement, le décès de son père lui a fait abandonner ses études et venir travailler avec moi dans une fabrique de passementerie. C’est pourquoi elle en voulait à la terre entière et qu’elle se rendait aux réunions de ces suffragettes pour protester contre les lois qui sont faites par des hommes. C’est là qu’elle est allée hier. J’ai peur qu’il lui soit arrivé quelque chose.