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Critique de alouett


Cette jeune femme de 27 ans se prénomme Marguerite.

Elle travaille, elle a une vie de couple, fait les courses, voit ses amies, aime ses chats… comme tant d'autres personnes. Une vie ordinaire en apparence… Une femme « normale ». Mais cette normalité, elle l'a acquise grâce à une multitude de rituels qui lui permettent d'organiser son quotidien. Des petits rituels répétitifs, de l'heure de partir au travail, de prendre le déjeuner, de préparer sa monnaie avant d'aller acheter le pain… Des rituels rassurants. Elle en a besoin de ces petites bouées. Elles seules lui permettent de ne pas être envahie par l'angoisse. Mais dans sa tête, c'est la tempête, les peurs… Assaillie par le bruit et les odeurs, mise à mal par toute forme de contact corporel… elle souffre du syndrome d'Asperger.



L'album s'ouvre sur une préface de deux thérapeutes (Carole Tardif est psychologue et Bruno Gepner est pédopsychiatre et psychiatre) qui présentent l'histoire de l'étude du syndrome d'Asperger. Les premiers écrits datent de 1944. Rédigés par Hans Asperger (un pédiatre autrichien) suite au travail qu'il a réalisé auprès de deux cent enfants autistes, ils décrivent pour la première fois les manifestations du syndrome.

Aujourd'hui, plus de 70 ans après la publication des travaux d'Asperger, cette forme d'autisme est encore mal connue. D'autant qu'il y a une particularité, une méconnaissance d'une partie de la maladie. En effet, si les thérapeutes parviennent à diagnostiquer plus facilement les hommes, la clinique reste partagée et très peu sensibilisée… et il reste difficile de diagnostiquer la gente féminine. Les symptômes de la maladie sont moins évidents à repérer pour les femmes, notamment parce qu'elles sont moins nombreuses. Les experts expliquent : « classiquement, le sexe ratio des troubles autistiques est d'environ quatre hommes pour une femme ». de plus, elles ne présentent pas toujours les manifestations habituellement repérées dans les cas d'autisme ; elles regardent leurs interlocuteurs dans les yeux et parviennent à mettre en place des rituels qui leur permettent de maintenir un semblant de vie sociale. La manifestation des troubles diffère donc entre hommes et femmes ; pour ces raisons (et d'autres que je n'ai pas cité ici), les caractéristiques de la maladie sont moins identifiables.

Julie Dachez est une jeune femme Asperger. Son personnage – Marguerite – lui permet de témoigner, indirectement, du quotidien de centaines de femmes aspies (personnes présentant un syndrome d'Asperger). Sans jamais s'apitoyer, elle décrit sa souffrance.
Le dessin de Mademoiselle Caroline porte avec délicatesse le témoignage de Julie Dachez. On se pose à peine dans ce monde, comme si on l'effleurait… effet miroir avec le monde intérieur de Marguerite qui fuit toute forme d'agitation, en quête permanente de lieux repérants. Sensible aux bruits, aux odeurs, aux mouvements, elle choisit généralement des lieux calmes et reculés pour se sentir le moins mal possible.
Puis, on assiste à la métamorphose. le déclic ? le diagnostic.

Le diagnostic qui soulage et qui vient mettre des mots sur ce qu'elle ressent. Ça lui permet de comprendre sa différence, de s'accepter telle qu'elle est. le dessin, jusque-là très sobre en couleurs, prend un virage très net. Si le trait reste le même, tendre, doux, discret, la couleur surgit des cases et donne de la chaleur à l'histoire. On la sent moins seule, plus assumée, optimiste. On perçoit également un changement dans son rapport aux autres. Jusque-là, les phylactères contenant les propos de ses interlocuteurs étaient rouges, signifiant que chaque échange avec autrui est une violence, une agression de chaque instant qu'elle subit. Désormais, s'il y a toujours cette angoisse de s'adresser à ses collègues de travail, à son médecin traitant, à sa cousine… cette difficulté c'est plus une généralité. Elle s'entoure de nouveaux amis, souvent des aspies comme elle, avec qui elle parvient à communiquer sans être mise à mal.

En fin d'album, des compléments informatifs sont proposés : deux parties se présentent au lecteur. Respectivement appelées « Qu'est-ce que l'autisme ? » et « le syndrome d'Asperger, kézako ? », Julie Dachez donne une définition simple à son syndrome. Car l'ouvrage ne se contente pas de raconter une histoire individuelle, intime… il sensibilise et informe le lecteur. Se battre contre les clichés, voilà un objectif que Julie Dachez s'est fixé et son blog est un des supports qu'elle utilise pour y parvenir.
Lien : https://chezmo.wordpress.com..
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