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Critique de SZRAMOWO


Roman emblématique de Didier Daeninckx, écrit en 1997, il se déroule en 1977, en France sous Giscard, au moment où après le vertige du jeune président et de sa société libérale avancée, la population éprouve les premiers doutes qui conduiront après les municipales de 1977 et les législatives de 1978, en dépit du discours de Verdun sur le Doubs et l'appel à la raison du bon choix, à la victoire de la gauche en 1981.
Roman d'atmosphère, dans lequel, le héros (mais peut-on qualifier l'inspecteur Cadin de héros ?) alors qu'il est de permanence à Marcheim pour assurer le déroulement sans troubles du premier tour des municipales dans cette petite ville où Emile Loos est assuré de l'emporter, se retrouve empêtré dans une enquête pour meurtre. La Liste Verts Demain l'a emporté dès le premier tour avec une majorité confortable mais, le soir même, le premier de la liste Alain Dienta, surnommé l'indien, est retrouvé mort sur le chantier de la centrale nucléaire.
Les mobiles ne manquent pas. Les suspects non plus. Dienta opposé à la construction de la centrale, malgré son succès « franc et massif », compte beaucoup d'ennemis. Ceux dont les intérêts seraient mis à mal si d'aventure la centrale ne voyait pas le jour.
Au premier rang, se bousculent : les entrepreneurs et sous-traitants locaux, les commerçants de la commune, EDF, les politiques locaux défaits qui avaient soutenu le projet, enfin l'état et ses officines de l'époque, le SAC notamment. le roman fait état plusieurs fois de l'assassinat de Pierre Overney le militant maoïste, à la sortie des usines Renault en 1972 et l'exécution en 1977 du vigile Tramoni par les NAPAP (Noyaux armés pour l'autonomie populaire)
Après avoir suivi toutes ces pistes, le plus souvent mises en cause ou refusées par sa hiérarchie, Cadin s'intéresse aussi aux mouvements libertaires dans la région, et aux lecteurs d'Actuel de la Gueule Ouverte et de Barabajagal…Plusieurs membres de la liste les Verts Demain y furent des militants actifs. le journal libertaire Klapperstei 68, son homologue Vroutsch continuent à faire du prosélytisme pour la lutte contre l'establishment.
Cadin est familier de ces mouvements. Il est à peine sorti de l'Université, et s'il a choisi la police, après avoir brillamment réussi le concours d'inspecteur, il ne défend pas l'ordre au sens où la plupart de ses collègues et la hiérarchie l'entendent.
Le personnage éprouve une certaine empathie pour ceux qu'ils interrogent au cours de l'enquête, mais ceux-ci ne la lui retourne pas, voyant d'abord le Flic avant de voir l'homme.
Qu'importe. Cadin va louvoyer entre les récifs idéologiques des deux bords. Lui se définit comme n'appartenant à aucun. Il a ses propres failles, il fréquente assidûment les prostituées du quartier de la gare et vit dans le dénuement le plus total.
Mais qu'importe, c'est un excellent flic et il dénouera les fils de cette enquête contre vents et marées.
Comme toujours chez Daeninckx, le récit emprunte à la fiction, mais repose sur des faits réels retranscris et flirte sans arrêt avec la philosophie et la sociologie.
Du grand Daeninckx. A lire pour ceux qui veulent se replonger dans les années 1970 et leurs lubies. Dépaysement garanti. Trip assuré.
Pour les curieux j'ajoute quelques liens vers la presse libertaire de l'époque et les personnalités politiques citées dans le roman :
http://klapp68.over-blog.com/album-1042775.html
Le sobriquet « l'Indien » était celui de Eric Pétetin militant écologiste de la Vallée d'Aspe figure de la lutte contre le percement du tunnel du Somport :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Éric_Petetin
Enfin, le maire de Strasbourg Pierre Pflimlin : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Pflimlin
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