AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ecceom


C'est le conte de l'Île

Dans ce roman, on suit Melvin Dahmani, vague informaticien escroc. Il a reçu un avis de décès concernant une jeune femme qu'il a aimée jadis, durant un été passé en Corse. Mais à peine, son pied a-t-il foulé le sol du cimetière qu'il se trouve plongé dans un tourbillon de meurtres qui ensanglantent l'île de Beauté.
Cette hécatombe semble reliée à des faits criminels bien anciens.
Melvin va mettre son nez (pointu) là où il ne faut pas, ne tenant pas compte du proverbe corse : "Tuttu si fàce, tuttu si sà, tuttu si tàce" (tout se fait, tout se sait, tout se tait).

Didier Daeninckx (un peu comme Tardi qui a illustré son roman "Le der des Ders"), m'agace parfois (notamment quand il donne dans le romantisme communo-libertaire), mais me ravit souvent.

Mêmes sentiments avec "Têtes de Maures".

Parmi ce que je n'aime pas, on trouve cette manie de citer des titres de chansons, de s'attarder sur des détails avec une tentation naturaliste qui pointe trop souvent son nez. Autre faiblesse à mon goût, le relatif manque d'épaisseur du personnage de Melvin Dahmani. Certes, il doit se ranger dans la catégorie anti-héros, mais on ne comprend pas trop ses motivations, ce qu'il cherche vraiment et pourquoi.
A vrai dire, même ce qu'il découvre ne semble guère présenter d'intérêt ou de danger particulier.

En revanche, Daeninckx m'a bluffé sur sa description des lieux, de l'ambiance et de certains comportements qu'on rencontre parfois en Corse. Il a du bien se renseigner car ça sonne très souvent juste.

Habilement, il structure son récit autour de faits historiques (qu'on peut facilement retrouver sur de très bons blogs consacrés aux villages de Poggiolo/Guagno ou aux bandits Spada et autres Caviglioli) qui expliquent les résurgences de haines ancestrales toujours pas taries aujourd'hui.
Il chapeaute aussi chaque partie, d'un (prétendu) extrait de journal local annonçant un nouvel assassinat.
L'effet est saisissant.

On pourra regretter l'image terrible que ce roman renvoie de ce plus beau département français du monde, mais il faut admettre que Daeninckx décrit parfaitement certaines pratiques (telles que ces terres agricoles devenant par hasard, constructibles du jour au lendemain, pour peu qu'elles appartiennent aux "bonnes" personnes).

Il souligne aussi combien il est naïf de garder une image aussi favorable des célèbres "bandits d'honneur", alors qu'il s'agissait la plupart du temps, de simples droits communs, psychologiquement dérangés.

Enfin, il pointe l'idée qu'aujourd'hui comme hier, l'Etat n'a jamais compris comment intervenir en Corse. le rappel de l'envoi de la Troupe par Laval en 1931 (près de 500 hommes) fait ainsi écho à l'invraisemblable démonstration de force de l'ineffable Poniatowski au moment de l'affaire d'Aleria en 1975.

Je revois encore le "CRS 3, Corse 0" sur les murs de Bastia en août de cette année là. le début de la folle spirale.
Commenter  J’apprécie          00







{* *}