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Critique de PetiteBichette


Après avoir été séduite par Majnoun et Leïli : Chants d'outre-tombe, j'ai souhaité poursuivre ma découverte de Yann Damezin.
Un univers complètement différent ici, car après les couleurs vives et presque criardes de Majnoun et Leïli, se trouve ici un tout autre monde, austère et froid, en noir et blanc.
Pas de quoi se réjouir, car si l'homme qui nous narre son aventure est né avec une cuiller en argent dans la bouche, elle n'a pas été remplie d'amour parental.
Le petit garçon autrichien peine à exister face à ses talentueux frères et soeurs, qui sont tous pourvus de dons en musique ainsi que ses parents, alors il s'escrime pendant des heures sur le piano, mais ses professeurs et sa famille ne lui concèdent aucun talent.
Le jeune Paul va s'acharner durant des heures sur son instrument qu'il semble frapper violement. Il va y mettre toute sa rage, son manque d'amour et de reconnaissance. Son rêve va être de devenir concertiste, contre l'avis de ses parents pour qui musicien n'est pas un métier véritable.
La première guerre mondiale va bouleverser sa vie, lors d'une mission e reconnaissance il est gravement blessé au coude. Lorsqu'il se réveille hébété à l'hôpital il découvre avec horreur qu'il a été amputé de la quasi-totalité de son bras droit. L'infirmière lui dit qu'il peut s'estimer heureux d'être encore en vie, tous n'ont pas cette chance, en plus il est désormais déclaré inapte au combat. Vivant, oui, mais mort à l'intérieur. Qu'est donc un pianiste avec sa seule main gauche à part un pianiste mort ?
Fait prisonnier, son grade et son infirmité lui permettent d'échapper aux tâches harassantes, il se met à jouer sur un piano imaginaire. À la fin de la guerre, de retour dans sa famille, il a soudain une illumination ; demander aux plus grands compositeurs de son époque de lui écrire des oeuvres. Ainsi Maurice Ravel lui compose Concerto pour main gauche mais également Benjamin Britten, Richard Strauss, Sergueï Prokofiev, …
J'ai oublié de vous dire que le jeune homme en question n'est pas n'importe qui, il s'agit de Paul Wittgenstein, qui a acquis une très forte notoriété par sa virtuosité.
D'ascendance juive, la famille Wittgenstein, bien que convertie au catholicisme depuis plusieurs générations va être pourchassée par le national-socialisme. Triste ironie du sort, car plus jeune, Paul Wittgenstein ne se cachait pas de ses idées fascistes.
Le traitement de ce pan d'histoire s'avère très intéressant, à nouveau admirablement servi par le dessin ciselé de Yann Damezin. Une belle découverte, même si j'ai été moins séduite que par la beauté onirique de Majnoun et Leïli.
« Il est normal que la jeunesse se moque.
Elle pense que les vieillards sont lents à cause de leur dos, de leurs articulations, de leur arthrose…
Elle ignore ce que nous avons de souvenirs et de regrets, qu'il nous faut tirer après nous à chacun de nos pas.
Puisse-t-elle l'ignorer longtemps.
Puisse-t-elle se moquer longtemps. »
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