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Critique de Laureneb


Lorsque j'ai découvert la Recherche du Temps perdu pour la première fois, c'était en khâgne. Notre enseignante nous avait conseillé de « surfer » sur les phrases, de ne pas s'y noyer en essayant de percer le mystère de leur construction, mais garder de la hauteur. Comme elle, Charles Dantzig file la métaphore marine tout au long de son essai, d'où le titre. D'ailleurs, Proust lui-même dans toute son oeuvre utilise les comparaisons – Proust use d'avantage de comparaisons que de métaphores – avec le milieu aquatique, évoquant les baignoires au théâtre ou la lumière d'aquarium du Grand Hôtel de Balbec.
Charles Dantzig étudie ainsi les personnages du roman en les comparant à différents animaux marins, comme la murène Verdurin avec sa cour de petit fretin qui l'entoure, à la sirène princesse de Guermantes. La métaphore de l'océan permet d'explorer plus ou moins en profondeurs certaines thématiques, ou de rester à la surface d'autres. Par moment, la métaphore peut sembler toutefois un peu forcée, ou, en tout cas, être un prétexte pour évoquer différents éléments. L'ouvrage étant justement organisé de façon thématique, j'ai pu regretter un plan pas assez structuré totalement à mon goût – c'est mon côté ancienne khâgneuse, j'aime l'ordre et les plans ternaires...
J'ai beaucoup écouté Charles Dantzig à la radio, notamment dans ses émissions sur ses études de personnages de la Recherche, ce qui fait que certaines de ses réflexions m'étaient déjà familières – et que j'avais sa voix en tête en le lisant. Je ne suis pas forcément du même avis sur lui à chaque fois, c'est cela qui est stimulant. Et n'ayant pas relu la Recherche depuis un certain temps, c'était un livre bien adapté pour moi : si j'ai oublié certaines situations ou certains personnages, je me souviens du cadre général, des principaux sujets abordés. de plus, son écriture peut elle-aussi faire penser à Proust, de part la structure même de ses phrases avec leurs incises et leurs digressions, avec un certain humour parfois féroce contre ses propres contemporains, et une inscription historique et contextuelle dans notre monde qui a ses propres formes de bêtise humaine, avec l'élection de Trump, les influenceurs de réseaux sociaux et certains comportements humains en période de pandémie.
Enfin, comme il le dit lui-même dans un numéro de Personnages en personne sur France Culture, lorsqu'on lit un livre, le personnage sur lequel on en apprend le plus est finalement L Auteur. C'est ainsi que ce texte est une réflexion toute personnelle – de façon totalement assumée - sur la Recherche, subjective et partiale, qui est aussi un moyen pour l'auteur de nous parler de lui : contrairement au Narrateur de la Recherche qui n'est pas Proust, l'auteur Charles Dantzig s'identifie clairement à celui qui parle, au Je, de son texte. Parlant de Proust, il parle donc de lui-même, de son enfance, de ses goûts littéraires, de ses amours, de sa sexualité. Il choisit donc les thèmes qu'il souhaite mettre en avant, il opère à une sélection – il met en avant les personnages qu'il préfère, évoque plus la thématique de l'homosexualité que celle de l'art ou la place de Venise, les tomes qu'il aime le mieux aussi...
Le but est atteint, j'ai envie de relire Proust – les snobs ne disent pas qu'ils lisent Proust, ils disent qu'ils le relisent...
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