Les conjonctions dans Proust sont l’ajout de maïzena dont la cuisinière précautionneuse fait un ajout ultime pour maintenir la sauce
Je regardais, sortant de la mer à Nice après avoir beaucoup crié avec ses potes, un de ces couillons de plage qui ne doivent jamais lire un livre. Il avait une omelette de cheveux noirs en haut du crâne dont les temps étaient rasées; pour la barbe elle était si apprêtée qu'il avait dû se faire épiler définitivement pour obtenir ces deux lignes droites à 55°, enfin quoi, un hipster. (...) D'ailleurs, il portait un tatouage. Comme chez tant de ces grands couillons, c'était une phrase. Et cette phrase, sur cette poitrine épilée au-dessus de laquelle ondulaient savamment de ronds deltoïdes, c'était : « Longtemps je me suis couché de bonheur » La littérature gouverne les Français qui ne le savent pas.
L'idéal de Proust et du Narrateur en amour n'est pas d'aimer mais d'être aimé.
Proust est un écrivain simple. En aucun cas il ne cherche à dresser des obstacles devant le lecteur, en semant des énigmes à la Joyce, en fermant son objet sur lui-même à la Faulkner. Il use beaucoup de comparaisons, plus accessibles que les métaphores, pose des "pensa - t - il", enfin tout pour que le nageur soit à l'aise. Sa grande, sa très grande singularité, car ce que je viens d'énoncer pourrait décrire un simple conteur, est la forme des phrases. Des phrases souvent longues, sinueuses, aux frémissements de surface et aux vibrations profondes, aquatiques vraiment, comme on n'avait jamais vu dans la littérature française. Proust, a assoupli notre langue à un point inouï.
Me méfiant de la mémoire, cette affabulatrice que nous laissons sortir sans permission, je soupçonne que ce que je dis de ces premières lectures a été élaboré par la mienne, suivant un phénomène de modestie que je ne tiens pas de Proust et de sa tactique de ne pas avoir l’air trop intelligent, mais d’une enfance toute de spontanéité accueillie par des haines.
(...) je crois qu'il n'y a pas de gaffes, il n'y a que des revanches déguisées en maladresses.
Quand les gens sans malveillance reproduisent machinalement des ironies, on peut dire que la greffe de haine a fructifié.
Le snobisme est une démangeaison bourgeoise.
Nous oublions que l'amour est une tyrannie. Non pas tant celle que l'on subit de ne pas obtenir sur-le-champ ce que nous désirons, celle que nous imposons à l'autre en lui disant « je t'aime » alors qu'il est loin de cela et voit arriver sur lui ce conteneur de fonte que nous prenons pour des pétales de rose.
Il faut avoir la force monstrueuse de Proust, jointe à une enfance heureuse, pour se baigner comme il l'a fait dans le bain moussant de son passé.