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Critique de kielosa


Pendant 36 ans Peter Dembowski a été professeur à l'université de Chicago aux États-Unis de Français médiéval et de Provençal. Arrivé à l'âge de 71 ans, en 1996, il a pris sa retraite et s'est rendu à Varsovie, sa ville natale, pour réaliser une ancienne promesse à Janina Landy Dembowska qui l'avait éduqué après la mort de ses parents. le présent ouvrage constitue cette promesse de jeunesse et il a dédié le livre à la mémoire de cette dame qu'il qualifie de "Ma plus que mère". Janina était l'épouse de Kazimierz Dembowski, le frère du père de Peter, mort de maladie en 1937. Sa mère, Henryka Sokolowska, a été exécutée au camp de Ravensbrück, en septembre 1942.

L'auteur est donc né à Varsovie en 1925 et comme adolescent il a vécu l'invasion horrible de son pays par les nazis. À 17 ans il a rejoint comme volontaire "L'Armia Krajowa" AK ou l'armée de l'intérieur, en fait la Résistance armée polonaise. En avril 1944, lors d'une rafle, il a été arrêté et envoyé à la tristement réputée prison de Pawiak. Coup de bol, il a été vite libéré, l'AK ayant réussi à soudoyer un gestapiste corrompu.

Au ghetto de Varsovie, Peter Dembowski a rencontré des personnalités bien connues, tels le grand archiviste Emanuel Ringelblum, le fameux pianiste Wladislaw Szpilman, sans oublier son propre frère Bronislaw, qui deviendra évêque de Wloclawek et sa soeur Zofia (1894-1972) qui fera des études de philosophie en France, auprès des professeurs Lévy-Bruhl et Durkheim à la Sorbonne et Henri Bergson au Collège de France et se lia d'amitié avec plusieurs grands intellectuels comme Jacques Maritain par exemple.

Après un passage dans les rangs de l'armée polonaise en Italie, ne voulant pas rentrer en Pologne, où il avait été témoin de tant de violence et d'injustice, Peter Dembowski a signé un contrat de travail pour des tâches saisonnières au Canada. Ensuite, il a entrepris de très solides études somme sa soeur Zofia, à Paris et à l'université de Berkeley en Californie, où il a obtenu un doctorat en philologie romane. Matière qu'il a enseignée pendant de longues années.

Contrairement à tous les ghettos polonais, celui de Varsovie comptait une communauté chrétienne qui possédait des paroisses organisées autour de 3 églises : Saint-Augustin, la Nativité de la Vierge et Tous-les-Saints. Si les nazis ont tout de suite détruit toutes les synagogues, ils n'ont, en revanche, pas touché aux 3 églises.

Les chrétiens du Ghetto de Varsovie étaient en fait des Juifs convertis pour toutes sortes de raisons. Comme dans l'esprit des Juifs orthodoxes et conservateurs la conversion était plutôt mal vue. Pour eux tout Juif était un descendant des patriarches Abraham, Isaac et Jacob, point à la ligne !

Ce sont les relations entre ces 2 communautés qui font, pour la toute première fois, l'objet d'une analyse approfondie. Pour mener à bien cette mission, l'auteur a pu bénéficier d'un grand nombre de documents personnels, notamment des journaux intimes, jamais publiés ou rendus publics. Dembowski avait évidemment le grand avantage de la langue.

Les nazis qui pratiquaient une explication raciale de la judéité, ne faisaient strictement aucune distinction entre Juif converti ou non. "Les Juifs chrétiens furent soumis à la même discrimination, persécution et annihilation que leurs frères de race".
Les Juifs représentaient, en 1939, à peu près 10 % de la population polonaise, soit 3,5 millions et Varsovie était, après New York, la vile qui comptait le plus de Juifs, environ 350.000. La plupart d'entre eux finiront au camp d'extermination de Treblinka.

Il s'agit d'un ouvrage historique fort instructif dans la mesure où Peter Dembowski n'a pas craint de s'attaquer à une question jamais sérieusement explorée et qui a dû être pénible pour l'auteur, confronté à une masse de douloureux souvenirs. Promesse oblige, mais quand même....

Finalement les 3 églises ont été rasées. Il ne restait du ghetto qu'un vaste amas de gravats, aujourd'hui déblayé et rebâti.
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