Citations sur Impunité (63)
Un gibier farouche, c'est celui qui ne se laisse pas apercevoir, celui qui fuit au moindre signe de danger. Pour ne pas être violées, les femmes devraient avoir peur, détaler devant les hommes ? Et vivre dans la mâchoire bien serrée de la domination masculine triomphante ? Se défendre d'une accusation de viol en remettant en cause la vertu de la victime est un poncif éculé. La vertu des femmes est l'éternel sujet, l'angle d'attaque ordinaire et toujours payant pour les disqualifier. Certains pays, comme l'Australie, ont pris des mesures juridiques pour éviter ça. Dans les procès de viol, il est interdit d'évoquer le passé de la victime. C'est hors sujet, tout simplement. Ce qu'on juge, c'est l'acte, pas la femme.
Plus l'homme est puissant, plus on lui octroie de « crédit de consentement ». Un crédit dont le capital se mesure à la tolérance à l'égard du gros lourd ou du grand séducteur. De toutes les impostures du pouvoir, cette ligne de crédit illimité de tolérance à l'égard de la délinquance sexuelle et la plus dangereuse. On invoque la personnalité charismatique de l'agresseur. Ces hommes sont supposés plaire, non pas aux femmes mais à toutes les femmes. on n'est pas loin du permis de violer. C'est un des fondements les plus solides de la construction de l'impunité. Patrick poivre d'Arvor était omnipotent. On lui a prêté, les yeux fermés, l'assentiment de toutes les femmes.
Raconter une humiliation violente au monde entier, en tout cas à son monde, ni un idéal de publicité ni une promesse de sérénité.
Pour construire ce système criminel et le faire tourner sans anicroche pendant une trentaine d'années, il ne suffit pas d'un homme, de phénomènes de cour, de la lâcheté d'un groupe social ni de cette tendance profondément humaine à confondre l'autorité avec la vérité. Il faut aussi un immense échafaudage, des superpositions de légendes sur le pouvoir, la sexualité, la séduction, les hommes et les femmes. Des millénaires de patriarcat ont recouvert la réalité de jolies histoires aussi fausses que bien tournées.
Parler reste un combat. On pare les mauvais coups comme on peut. On se bat contre des procédures-bâillons et des mythes vivaces qui nous accablent.
On a encaissé. On a nagé dans les eaux glacées du calcul égoïste et de la résistance patriarcale. On s'est serré les coudes. On s'est défendues.
On a parlé plus haut, plus fort, plus nombreuses.
On a appris.
Une fois encore, un temps précieux était cédé au déni.
il a fallu à Louise des semaines, peut-être des mois, pour admettre la situation. Après en avoir discuté avec le médecin du village, j'imagine qu'elle a fini par y parvenir, du moins dans l'intimité de sa conscience. Mais, sur le terrain des apparences, elle ne pourrait jamais rien concéder. Ma grand-mère avait fuit la guerre et l'Italie avec sa famille alors qu'elle n'avait que douze ans. Elle avait passé sa vie entière à se soustraire au mépris d'une société qu'il l'avait longtemos considérée comme une étrangère. Elle s'était acharnée à faire oublier ses origines italiennes dans une belle famille qui ne voulait pas d'une telle union. Elle en avait presque perdu sa langue maternelle. Elle ne pouvait pas tout laisser tomber.
"Aucune personne raisonnable, homme ou femme, ne peut vivre dans un endroit où les voisins ne veillent pas les uns sur les autres." David Graeber Anthropologue
."..seul un oui est un oui" ... l
Le consentement sexuel doit être librement et clairement exprimé. Il doit être explicite. (...)
Rien de compliqué, rien de dangereux pour la société : juste un renversement de la charge de la preuve. Quand un homme est accusé de violences sexuelles, c'est la preuve du consentement de celle( ou, plus rarement, de celui) qui l'accuse qu'on doit apporter pour l'innocenter.
Le délit de diffamation est une arme puissante. En obtenant la condamnation de l'expression de la victime, il constate l'inversion.
La version de la culpabilité suppose la mise en scène de la souffrance du dominant. Il a droit de mobiliser l'État et sa justice pour valider le préjudice qui lui est fait. C'est la reconnaissance sociale, l'adoubement collectif, la certification par le système judiciaire de son propre statut de victime. L'inversion est ainsi labellisée par l'institution.