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Critique de Merik


Bienvenue à Las Végas, au Positano Luxury Resort Hotel & Casino. Dario Diofebi exploite le lieu en fouillant quatre personnages dans un premier roman ébouriffant, construit admirablement avec une bombe en point d'orgue. BOUM ! du grand spectacle en IMAX pour un roman ambitieux.

« Tout était à la fois extraordinaire et insipide».
Il y a dans certaines premières phrases de roman une portée indéniable, entre élan de mystère et appel d'air insondable, elles amorcent en prévenant à peine la plongée dans un univers inextricable. Celle-ci intrigue dans ce prologue qui annonce aussi le point final du Positano Luxury Resort & Casino, bombe et incendie au menu. On la recroisera cette première phrase, au paroxysme du roman dans un climax inouï, après avoir fait connaissance avec les protagonistes.

« Nous ne pouvons pas commencer à expliquer la soirée du vendredi 1er mai 2015, au Positano, la bombe dans le salon Scarlatti, le bruit de l'alarme, la panne géante, qui s'en est sorti et qui, tragiquement, n'en a pas réchappé, sans essayer d'évoquer, au moins par bribes, l'histoire de ceux qui étaient là. »
Ray tout d'abord. Peut-être le plus emblématique d'une époque à la croisée des nouvelles technologies, « le moins humain des humains », homme de chiffres issu d'une famille de lettres. Il pense variance et espérance pour chaque main de poker, envisage le jeu comme une suite de décisions à prendre, optimales cela va de soi, en dehors de toute émotion. Seule la Tragédie semble pouvoir l'affecter. Ou peut-être bien cette « Putain de variance ».
Mary Ann vient quant à elle d'embaucher au Pos, elle sera serveuse après s'être débarrassée de la « spirale narcissique » des réseaux sociaux, suite à une anhédonie et une tentative de suicide. Un nouveau départ pour cette jeune fille qui a rêvé de gloire via le mannequinat, et qui a surtout pensé à elle jusqu'à présent, encore à elle et toujours à elle.
Elle y croisera peut-être le chanceux Tom, italien d'origine loin du stéréotype gominé ou mafieux, invité à Las Végas grâce un lot improbable récolté à une partie de poker romaine.
Et puis il y a Lindsay, issue d'une famille de mormons, journaliste qui rêve d'écrire des romans et d'échapper à sa condition de gratte-papier d'histoires sans saveur à Las Végas.

« Las Végas est une ville d'histoires »
Ça ressemblerait à un lieu commun dans ce genre de roman d'inclure la ville dans ses portraits. Las Végas est omniprésente bien sûr avec « sa vulgarité criarde », un artefact de l'addiction aux jeux d'argent en plus d'être une ville « arrachée au désert » pour assouvir la cupidité humaine. Une ville à histoires. Celles des quatre s'y fomentent sur des chemins balisés d'addiction pour le lecteur, sur le fil tendu d'une prose à la fois dense et gigogne, précise et ironique, pour élaborer des psychés fouillées d'une Amérique désabusée. Des histoires qui se croisent, s'entremêlent, s'agencent, se démultiplient, s'entrecoupent ou se côtoient, leurs trajectoires finissant par converger en un faisceau d'espace-temps commun, le vendredi 1er mai 2015 dans l'entonnoir du Strip, dans un monde à la rencontre de l'IA, soumis aux diktats de l'argent. Elles tissent une petite part de constellation humaine de la cité, mais elles tissent surtout la toile d'un roman prolifique à l'ampleur tentaculaire, un roman étourdissant, dynamiteur d'un rêve américain qui se croyait à portée d'une richesse instantanée, et qui dévoilera – sans laisser trop de place à l'incertitude, un fond d'humanité dans ses décombres.
Et puis « Paradise, Nevada » profile aussi la silhouette d'une autre histoire, à la teneur autobiographique cette fois : celle d'un italien débarqué aux États-Unis pour jouer au poker dans un premier temps.... Avant de devenir l'auteur de ce roman ambitieux, qui a fait sensation outre-Atlantique.
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