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Critique de karmax211


"La France a vécu non seulement un mouvement historique, mais une répression de masse. Officiellement : 2500 blessés, 12 000 arrestations. 314 personnes atteintes à la tête par un flash-ball, dont 24 personnes ayant perdu un oeil, Mme Redouane tuée des suites d'une grenade lacrymogène tirée vers sa fenêtre, et, donc, cinq mains coupées."
Tel est, aux yeux de Sophie Divry, journaliste et écrivaine, le bilan "humain" qui résulte de ce qu'on a appelé les "Actes... 1,2,3...15... 25... ) du mouvement des Gilets Jaunes.
Ce faisant, elle a choisi d'écrire un livre témoignage sur cinq de ces Gilets Jaunes qui, en voulant ou pas s'en saisir, ont perdu une de leurs mains après l'explosion d'une grenade (GLI-F4) offensive, lancée par les forces de l'ordre... à des fins... ???
Ces cinq manifestants sont Antoine, étudiant animateur, Bordelais de 27 ans, Frédéric, lamaneur , Girondin de 36 ans, Sébastien, tourneur-fraiseur, Parisien de 30 ans, Gabriel, compagnon chaudronnier, Manceau de 21 ans, Ayhan, ouvrier-syndicaliste en usine, de Saint-Pierre-des-Corps âgé de 53 ans.
Sophie Divry va recueillir et retranscrire fidèlement chacun de leurs cinq témoignages.
Ces témoignages sont structurés sur "un schéma" identique.
Leur identité sociale, économique, professionnelle, familiale, leurs goûts, leurs rêves, la ou les raisons de leur participation à l'un des "Actes" des Gilets Jaunes, les circonstances de "l'accident", la prise en charge de l'urgence, l'hospitalisation, l'intervention ou les interventions chirurgicales, la mutilation, la rééducation, la prothèse, le regard des autres, la réinsertion, la plainte et la décision de justice... les séquelles psychologiques et la survenue ou l'attente du choc post-traumatique.
Il est évident que je ne vois ces hommes que comme des hommes et des hommes victimes... lourdement victimes... de qui ou de quoi ... il ne m'appartient pas de le dire.
Je les plains, je déplore ce qui leur est arrivé et je comprends l'immensité indicible de leur(s) souffrance(s).
Je me propose de présenter un livre... c'est tout.
Ce livre est le réquisitoire partial d'une journaliste qui a d'emblée pris parti pour ce mouvement.
Tout, sans exception est à charge contre Macron, Castaner, Lallement et autres...
Certes, ces responsables ont des responsabilités.
Mais quid d'un mouvement, dès le début, récupéré par l'extrême-droite, les complotistes et les antitout ?
Pour Sophie Divry et ses cinq mutilés... ils allaient quasiment à un pique-nique... c'était bon enfant..."J'étais habillé en noir... c'est ma manière de m'habiller c'est tout, je ne suis pas un black bloc..." .
Pour nous, c'était plus une sortie familiale... quelques projectiles volaient de par derrière, mais rien de bien méchant..."
"Avec des amis, on avait acheté deux douzaines d'oeufs pour lancer sur les policiers, parce qu'on ne se sentait pas de lancer des pavés ! On les a lancés, ces oeufs, c'était rigolo. C'était quelque chose d'un peu potache."
"J'ai un peu tapé sur des panneaux métalliques, mais juste pour faire du bruit".
Donc, rien que des "gentils, venus faire une excursion à Paris ou dans une ville de province... et ignorant que dès les premiers jours, il y a eu des violences et des morts... Gilets Jaunes et non-Gilets Jaunes.
Dès les deux premiers actes, il y a eu des émeutes, des pillages, des actes de vandalisme... bref, une extrême violence.
Dès le début, médias et manifestants ont fait mention des LBD, des granades etc
Et Sophie Divry nous affirme que ces cinq hommes ignoraient tout de la mise à feu et à sang de la France depuis le 18 novembre par 350 000 Gilets Jaunes ( au plus fort du mouvement )... !
Je n'aurai pas la cruauté de rappeler ici qui étaient les figures de proue,, les leaders dudit mouvement, mais cette révolution "à l'envers" conduite par des pieds nickelés extrêmistes, putschistes, complotistes aux QI de bulots, ne pouvait qu'entraîner des braves gens, mus au départ par des revendications légitimes, vers des impasses désastreuses.
Ça aussi, j'aurais aimé le retrouver dans le bouquin de Sophie Divry... qui ne présente qu'une vision, je le répète, à charge contre les autorités... allant jusqu'à dire de manière pathétique qu'une main "habile et passionnée" vaut davantage que le saccage de ce vieux monument qu'est l'Arc de Triomphe.
Et de terminer son réquisitoire ainsi :
"Que va devenir ce pays où on coupe des mains à des ouvriers et à des étudiants ?"
En ce qui me concerne, le parti pris de la journaliste-écrivaine est contre-productif.
Certes, les forces de l'ordre face à un mouvement inédit, réfutant tous les codes, toutes les règles liés au droit à manifester : autorisation, itinéraire, encadrement... préférant l'effet de surprise, jouant la mobilité, la dispersion, le cache-cache, le chat et la souris, se livrant à la guérilla urbaine dans la plus grande pagaille, le plus grand chaos...ces forces de l'ordre ont apporté de mauvaises réponses.
La question est... en l'état que pouvaient-elles faire ?
Laisser le chaos prospérer... pour dériver vers quoi ? Une guerre civile ? Un putsch ?
Les Gilets Jaunes en se lançant dans une aventure à laquelle ni eux ni le pays n'étaient préparés ont ouvert une boîte de Pandore... de laquelle est sorti le pire pour ces cinq mutilés et leurs compagnons éborgnés.
Mais ça, Sophie Divry ne veut pas en entendre parler.
L'Histoire, ou peut-être avant elle, la justice déterminera les responsabilités de chacun.
En attendant, je suis persuadé... je l'ai été depuis le début du mois de novembre 2018... que ce mouvement qui n'a pas voulu se structuter, a payé cher les fruits de son "astructuration".
Pour terminer sur une note un peu plus littéraire, cest cinq témoinages sont proposés sous une forme chorale. Les cinq voix racontent ensemble, indistinctement, créant un effet amplificateur, un effet groupe ou foule, déstabilisant le lecteur qui se sent pris au milieu d'une bousculade.
J'aime et m'efforce de penser contre moi-même, raison pour laquelle j'ai tenu à lire cet ouvrage.
Le choix d'en faire autant ou pas, appartient à chacun d'entre vous...
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