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Critique de Carolina78


COUP DE COeUR

« La barque glisse sur l'eau régulièrement, un train sur des rails. Depuis qu'il est là, son corps a eu le temps de s'accommoder à l'exercice, « il a fait du muscle », dirait sa mère. du muscle, mais pas seulement : le geste est fluide et assuré. Janvier maîtrise son embarcation, elle file à travers les rues silencieuses, on ne sent plus les coups de rame. »

Janvier est serein. Il aime les grandes marées quand l'eau engloutit « les murs décrépis, les objets qui jonchent le sol, les maisons qui menacent de s'effondrer, les trottoirs détruits. Inondée, la ville rutile, comme neuve. »

Depuis un an et demi, il est conscrit civil à La Rochelle. Il a le plaisir d'enseigner aux enfants. Il s'est installé dans une routine reposante.

Il est dans l'instant présent, fait abstraction de la chaleur infernale, de la Rochelle devenue un taudis, des miséreux qui hantent les rues, les nantis sont partis, seuls sont restés les déshérités et marginaux, rejoints par des migrants et des laissés-pour-compte.

Il a fallu qu'il s'adapte. Janvier a dû renoncer à sa vocation d'agriculteur. Il ne peut s'empêcher de ruminer sa violente dispute avec son grand-frère Félicien qui l'a contraint à quitter la ferme familiale, située à Lachamp, petit village de Lozère.

Il n'ignore pas la situation politique chaotique, entretenue par la désinformation et les rumeurs qui brouillent les pistes, avec en toile de fond, la prise de pouvoir par le parti de la France Éternelle, suite à la démission du gouvernement de coalition écologiste, éclaboussé par un scandale financier, et les attentats terroristes du mouvement écologique MCPP.

Janvier ne sait pas encore qu'un variant du virus Ébola sévit et qu'il va devoir faire marche arrière, fuir.

Nous allons le suivre dans son périple de la Rochelle à Lachamp, d'abord à pied, puis à vélo, puis à nouveau à pied. Ni la peur, ni la faim, ni le désespoir ne nous seront pas épargnés, mais nous vivrons une belle aventure palpitante, parsemée de rencontres et d'imprévus, avec des frayeurs mais aussi quelques moments d'intense bonheur.

Nous allons prendre notre temps, et même faire une halte de plusieurs mois dans une ferme, dans le Cantal. Notre lecture, ponctuée par des phrases courtes sans fioritures, va nous permettre d'avancer au rythme du souffle de Janvier. Les mots vont s'écouler doucement comme des pas ou la lente dérive d'une barque sur l'eau.

Le retour de Janvier, ou l'Odyssée, non pas d'Ulysse, mais de Janus, le Dieu aux deux visages, l'un tourné vers le passé, l'autre vers l'avenir, nous fait osciller dans un rêve éveillé, entre plusieurs temporalités.

Les francs sont encore en usage. Il n'est pas possible de retirer plus de 2000 francs en liquide avec une carte bleue. Avec le nouveau gouvernement, ils vont augmenter la solde des militaires : « Ça va aller jusqu'à 30 000 francs pour les non-gradés. »

Ce variant d'Ébola a une familiarité troublante avec le Covid.

Les tickets de rationnement nous rappellent la seconde guerre mondiale.

Nous n'en sommes pas encore au point de dormir avec un fusil à portée de main, mais prenons garde car cette situation chaotique, de dérèglement climatique et marasme politique conjugués, nous menace fortement.

Dans tout ce désastre, le retour de Janvier est une ode à la nature, au retour aux sources, un éloge du labeur des champs.

Je viens de vivre une expérience inédite, je viens de m'incarner en Janvier – osmose absolue -.

Je tiens à remercier chaleureusement Charlotte Dordor de m'avoir offert ce merveilleux voyage intérieur. J'invite tous les babéliotes, si ce n'est déjà fait, à profiter de cette prodigieuse escapade. J'aimerais bien avoir vos retours !

Finissons sur une note d'espoir poétique avec la citation placée en exergue au début du roman. Faisons comme Janvier mettons-nous en route et au travail !

« le soleil n'est jamais si beau qu'un jour où l'on se met en route. »
Jean Giono, Les Grands Chemins
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