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Critique de Tagrawla


J'ai fini Les Démons et me voilà bien embêtée.
C'est un livre qui entre pleinement dans la catégorie « tout le monde devrait le lire ». Évidemment, ça n'arrivera jamais. Mais en plus, parmi ceux qui le feront, les deux tiers abandonneront sans doute avant la quatre-centième page. J'ai des statistiques très fiables à ce sujet : les précédents propriétaires de cet ouvrage acheté d'occasion ont laissé des marques pages bien avant ça et ne sont donc visiblement pas allés au bout. Je ne leur jetterai pas la pierre : la première partie est la moins intéressante, juste ce qu'il faut pour camper un décor, et il faut persister pour pouvoir apprécier pleinement l'oeuvre. Et je suis sûre que ceux qui s'accrochent ne le regrettent pas.
Quoi qu'ancrée dans l'époque de Dostoïevski, Les Démons restent une oeuvre intemporelle. On nous décrit ici les déboires d'une société où les puissants méprisent les pauvres tout en s'égarant eux-mêmes dans les futilités les plus absconses. Et ce ne sont pas les quelques proto-socialistes tous issus de milieux nobles ou bourgeois qui relèvent le niveau. C'est bien simple, et le titre l'annonçait bien : aucun des personnages n'est autre chose qu'odieux. Les moins affreux ne sont que lâches et chouineurs, et les pires sont des criminels pervers.
Si le roman ne manque pas de crimes, de mépris et de décadence, on peut être plus surpris par des passages vraiment plein d'humour. Drôle n'est peut-être pas le premier mot qui vient en tête quand on évoque Dostoïevski, et pourtant il ne manquait absolument pas d'humour.
Ne mentons à personne : oui, c'est une lecture ardue, par sa longueur, mais aussi du fait du nombre de personnages conséquent. En outre, si on ne maîtrise pas les constructions patronymiques russes, l'affaire devient compliquée : il faut savoir que Nicolaï, Vsévolodovitch et Stravoguine sont la même personne, qu'on le nomme Nicolaï, Vsévolodovitch, Stravoguine, Nicolaï Vsévolodovitch, Nicolaï Stravoguine, Nicolaï Vsévolodovitch Stravogine ou le fils de la Générale qui n'est pas Générale mais veuve de Général et qui se nomme elle-même Varvara Petrovna, ce qui n'a rien à voir et donc n'aide pas. Et forcément, si on multiplie tout ça par le nombre de personnages, il y a de quoi s'égarer. Mais c'est un exercice mental auquel on s'habitue et la construction de la psychologie des personnages dont Dostoïevski est un très grand maître limite énormément les risques de confondre les uns avec les autres. En outre, que les réfractaires aux longues descriptions telles qu'en produisaient chez nous Balzac ou Zola soient rassurés : ça n'est absolument pas le genre de Dostoïevski. Lui s'attache aux personnages, à leur psychologie, à leurs pensées, à leur façon d'interagir les uns avec les autres, mais il se fiche bien du bouquet de fleurs posé sur la table ou de la forme exacte de la toiture de la maison. Pour le décor proprement dit, votre imagination suffira amplement.

Si vous n'avez jamais lu de roman de Dostoïevski, je déconseillerais de commencer par Les Démons : Crimes et Châtiments est infiniment plus abordable. Mais si vous avez déjà un peu d'expérience avec le grand auteur, ne vous laissez pas impressionner, faites preuve d'un peu de patience et je vous promets qu'à la fin, vous regretterez que ce soit déjà fini. Mais si vous n'y arrivez pas, ça n'est pas non plus un drame, au moins, vous aurez essayé.

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