AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de butineries


Dans ce livre aux chapitres fort explicites (le premier s'intitule le début, le dernier… la fin), l'avant-dernier, les bois sales, est particulièrement intense et hypnotisant. L'histoire débute à Toulouse où vit Paul, 48 ans, écrivain fatigué. Il résume sa vie professionnelle à « une pile… de… 24 cm de haut pour 3,490 kg de papier. » L'inventaire qu'il dresse de son existence est lui aussi plutôt négatif : un divorce et pas d'enfant. Il prend conscience de sa solitude et de « la vacuité de son travail. » « En choisissant le métier de romancier j'avais fait fausse route. » « J'étais désargenté, désenchanté. » L'heure du bilan a donc sonné.

Paul quitte la France et atterrit d'abord en Floride où il vit de petits boulots. Il rencontre des individus qui s'avèrent finalement peu recommandables et il contracte un virus qu'aucun médecin n'est capable de diagnostiquer. Il poursuit son voyage jusqu'à La Tuque, au nord de Montréal. « Je n'eus plus qu'un seul désir, irrépressible : m'asseoir au bord du lac où mon père s'était noyé. » Ce père, prénommé Fulbert – « Enfant, ce prénom me terrifiait » -, disparaissait chaque année deux mois par an pour vivre sa passion de pêcheur dans la région des lacs au Canada. Paul est accueilli par Jean, un ami de son père, Jean qui l'embrasse « à la façon un peu rugueuse d'un vieux père » et qui lui révèle un secret aussi inattendu qu'énorme. Pour digérer cette révélation qui bouleverse le cours de sa vie, Paul s'installe d'abord dans la cabane au bord du lac où a disparu son père.

Et puis arrive ce fameux chapitre les bois sales, passage initiatique où Paul s'enfonce dans « l'impénétrable toison de la forêt » où il n'y a pas d'autre option qu' »Avancer. Me concentrer sur ce verbe. Oublier la peur et ses peurs. » S'ensuit entre le père et le fils un dialogue imaginaire où chacun règle ses comptes. le fils risque sa vie pour trouver enfin son propre chemin et découvrir « la valeur exorbitante de la vie. » La fin du livre, triomphante, est magnifique. Et heureusement pour nous, le narrateur se décide à raconter son histoire incroyable dans un 14e roman.

Dans ce livre où la nature toute puissante est un personnage à part entière – « Les bois avaient refermé leurs portes sur moi » -, l'écriture est simple mais d'une grande qualité. Elle est juste parfaite. Elle délecte, elle régale. Jean-Paul Dubois décoche certes une volée de flèches autant contre les écrivains (auto-dérision ?) que contre les médecins, mais se penche aussi sur nos peurs, nos manques, nos règlements de compte, nos désillusions, nos espoirs.

(Livre sorti en 1999 et réédité en 2021. Courez l'acheter !)
Commenter  J’apprécie          131



Ont apprécié cette critique (13)voir plus




{* *}