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Critique de Alfaric


Face aux dessinateurs de mangas qui sortent 48 pages en 2 semaines et face aux dessinateurs de comics qui sortent 48 pages en 2 mois, il est difficile de fidéliser un public avec des dessinateurs de bandes dessinées qui font 48 pages en 2 ans… Donc de plus en plus d'éditeurs ont opté pour la formule gagnante de la collection thématique où interviennent plusieurs auteurs (les puristes crient à l'hérésie, mais il fallait bien trouver une solution pour ne pas dépérir encore davantage face à la concurrence). C'est dans cette optique qu'après la collection "Sept" les éditions Delcourt ont continué à dégainer avec la collection "Jour J" dédié aux uchronies !
(mais il y a un truc chiant avec cette dernière, c'est qu'à chaque nouveau tome ne sait pas s'il s'agit d'un one-shot ou la première partie d'une minisérie)


Dans ce tome 5, intitulé "Qui a tué le Président ?", le point de divergence est le 8 novembre 1960 : Nixon qui a convaincu la mafia et l'appareil d'Etat de miser sur lui plutôt que sur Kennedy est élu Président des Etats-Unis d'Amérique… Quand j'ai lu cet album j'ai apprécié sans plus, mais quand je l'ai relu j'ai été littéralement happé par la tragédie qui nous est contée !
Le récit est divisé en 2 parties :
- dans une 1ère partie, Chris French nous raconte sa triste vie… Fils d'un Alsacien devenu SS de son bien gré avant de monter en grade, d'être dans le dernier carré du bunker du Führer et d'être exfiltré vers l'Ouest, Chris French est en pleine crise d'identité… Pour défier son père, il intègre les Hell's Angel avant de s'engager dans la Guerre du Vietnam. Pour des raisons que la raison ignore, il est hanté par les fantômes des anciens compagnons de son père au sein de la Légion Étrangère qui s'échinent à l'avertir de tous les dangers qui menacent sa vie. C'est ainsi qu'il traverse les heurs et les malheurs du bourbier vietnamien, et les auteurs se font une joie de piocher dans les grands moments de "Voyage au bout de l'enfer", "Full Metal Jacket", "Apocalypse Now", "Platoon"… jusqu'au moment où il tue un officier taré qui les avait condamnés à mort lui et les siens parce qu'incapable de ravaler sa fierté…
- dans une 2e partie, Chris French est sorti de prison pour abattre le Président Nixon !
Nous suivons alors le récit dramatique de l'Amérique où ces raclures de Chicago Boys, maudits soient-ils eux et leurs très thuriféraires jusqu'à la 13e génération, avancent leur agenda suprématiste : le peace & love est écrasé dans le sang, l'opposition politique est achetée, l'opposition médiatique est muselée, les citoyens sont sous constante surveillance policière et les contestataires sont envoyés dans un camp de la mort situé au fin fond du désert californien… Bref on a euthanasié la démocratie, et pour ne rien gâcher on organise dans la joie et la bonne humeur le génocide des Vietnamiens. Et pour rallier tout le monde au travail / famille / patrie si cher aux classes dirigeantes qui n'y croient aucunement, on se prépare à recourir à l'arme nucléaire contre la Chine et ainsi en finir une bonne fois pour toute avec l'ennemi sans nom qui pourrait être n'importe qui (théorie du choc prônée par ces raclures de Chicago Boys qui préfèrent une « bonne » dictature régressiste à une « mauvaise » démocratie progressiste, les populations latino-américaines qui s'en pris plein la gueule pour pas un rond peuvent en témoigner longuement !)… On est au bord de la WWIII, mais les ploutocrates en ont rien à carrer, vu qu'ils ont les moyens financiers de survivre à l'holocauste nucléaire : c'est là que Kissinger et Batista décident de trahir l'Oncle Sam pour sauver ce qui peut encore l'être…
Au final l'intermédiaire sans nom, ex de la Légion, désobéit à ses ordres et part à la rencontre de Chris French pour lui sauver la vie, mais ce dernier persuadé qu'une fois de plus il a été trahi et il l'attend de pied ferme pour lui régler son compte… à la frontière du Texas et du Mexique, la tragédie est en marche ! (Pleurs)

Si ma relecture a été aussi fructueuse, c'est qu'ayant identifié une possible inspiration du côté du film belmondien culte "Le Professionnel" j'ai mis à contribution la BO du génie Ennio Morricone : rhâââ lovevly !
https://www.youtube.com/watch?v=94GK0ppVD-Q
OK pour le scénario de Fred Duval et Jean-Pierre Pécau qui excellent dans la Série B mais qui valent bien mieux que cela, OK pour les graphismes de Colin Wilson assisté de Jean-Paul Fernandez aux couleurs car on sent bien l'ambiance années 1970 qui rend joliment hommage à la contre-culture engagée des années 1970 !
La transition entre les néocons français qui regrettent le bon vieux temps du colonialisme où les bougnoules trimaient sans rechigner et les néocons américains qui regrettent le bon vieux temps de l'esclavagisme où les négros trimaient sans rechigner est parfaite : mêmes combats pour tous les gros cons à vouer aux gémonies pour des générations et des générations… Et parfait est également le parallèle qui est fait entre les néocons qui ont fait assassiner le Président Kennedy (ben oui c'est forcément eux qui sont coupables si on applique les principes universels du cui bono et du Rasoir d'Ockham), et les résistants aux forces obscures de la crevardise qui ici décident de faire assassiner le Président Nixon.
Ce tome 5 sorti début 2011 est un What If ? d'une brûlante actualité tant les homines crevarices ne se cachent même plus qu'ils veulent effacer tous les progrès effectués ses 50 dernières années pour revenir au bon vieux temps d'avant, celui où les riches étaient plus riches et faisaient ce qu'ils voulaient, et où les pauvres étaient plus pauvres et n'avaient qu'à fermer leur gueule pour trimer ou crever… Va te faire foutre, Monde de Merde !
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