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Critique de LadyDoubleH


Eileen Gray, une maison sous le soleil est un roman graphique sur Eileen Gray (1878-1976), une architecte et décoratrice d'intérieur irlandaise. Reconnue aujourd'hui comme l'une des figures majeures du modernisme, le génie de son travail a longtemps été éclipsé, voire même injustement attribué à ses collègues masculins. Charlotte Malterre-Barthes et Zosia Dierzawska la mettent ici en lumière, elle et la villa E-1027 qu‘elle a créé à Roquebrune sur la Côte d'Azur pour son amant de l'époque, l'architecte roumain Jean Badovivi, créateur de la revue avant-gardiste L'Architecture vivante.

Née près d'Enniscorthy en Irlande en 1778, dans le manoir de Brownswood, elle se passionne très jeune pour l'art, qu'elle étudie entre Londres et Paris, et pour – entre autre – la laque chinoise, qu'elle apprend à travailler dès 1905 comme apprentie dans un atelier de restauration à Londres. Eileen est une femme libre et indépendante, originale et discrète. Elle crée des meubles, des laques, des paravents et des tapis, des oeuvres d'une beauté simple et élégante. En 1922 elle ouvre rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris une galerie d'art, sous un pseudonyme masculin : « Jean Désert » (« Lancer une affaire est déjà suffisamment audacieux, il n'y a pas de mal à prendre un pseudonyme masculin pour se faciliter la vie. Ce qu'on ne ferait pas pour être prises au sérieux, Hmm ? »)

De 1926 à 1929 se construit son grand oeuvre, la villa qu'elle crée avec et pour Jean Badovici, et baptise E-1027. On n'a pas l'impression comme ça, mais c'est en fait un nom très romantique : « Cet endroit est un vrai mélange de nous deux, d'où son nom, E-1027. C'est un acronyme de nos initiales. ‘E' pour Eileen, ‘10' pour Jean, J étant la dixième lettre de l'alphabet, 2 pour ‘B' – Bado – et 7 pour ‘G' : Gray ! »

J'aime beaucoup la conception qu'Eileen a de l'architecture, aux antipodes des idées de l'époque et de celles de le Corbusier en particulier : « La pauvreté de l'architecture moderne découle d'un manque de sensualité. Voilà le vrai problème ! Tout est dominé par la raison ! Une maison n'est pas une machine à habiter ! C'est une extension de ses habitants, ce qu'ils dégagent, c'est leur émanation. »

Le Corbusier qui, en 1938 – Eileen et Jean sont séparés et ce dernier vit toujours à E-1027 – va peindre des fresques bariolées sur un mur intérieur de la villa, en dénaturant complètement l'esprit voulu par Eileen. Il va même jusqu'à ne pas démentir ceux qui lui attribuent la paternité de la villa… Ceci dit, ça ne lui a pas porté chance : en 1965, il se noie juste à ses pieds, durant sa baignade quotidienne.

Cet album m'a permis de découvrir l'existence d'une femme brillante et inspirée, mais il m'a laissée sur ma faim. Pas assez de texte, le scénario ne fait qu'effleurer quelques moments de la vie d'Eileen Gray, alors qu'il y aurait tellement à dire sur son parcours, son oeuvre et sa vision. de même, côté dessin, s'il est de qualité, il m'a semblé qu'il s'adaptait mal au personnage et à son oeuvre. Trop compassé, figé peut-être, pas assez net. Eileen aussi nous reste hélas à distance, un peu floue. A noter par contre une annexe biographique intéressante des personnages en fin d'ouvrage et l'objet livre en lui-même, qui est réussi avec sa couverture rigide et texturée, et étonnamment léger je trouve, pour son volume.
Lien : https://lettresdirlandeetdai..
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