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Critique de Malaura


Clément, Guillaume, Suzie et Bernadette sont frères et soeurs. En 1945, après la guerre, ils ont eu à subir les terribles représailles et l'humiliation de la vindicte populaire pour leurs agissements passés.
Les deux soeurs ont été battues, violées et tondues sur la place publique, devant un public hilare, pour avoir fricoté avec l'ennemi.
Guillaume, être veule et mou, a fui ses engagements militaires et a déserté. Quant à Clément, ses airs de bon soldat et de redresseur de torts camouflent mal le parfait sale type qu'il est en réalité, n'ayant pas hésité à dévaliser les maisons du voisinage et à détrousser les morts de guerre quand l'occasion se présentait.
L'aversion, le rejet, le dégoût qu'ils inspirent les a alors convaincus de se cloîtrer définitivement dans une petite maison perdue dans la campagne.
Bientôt se referme sur eux la lourde porte de la masure. Lourde de la honte et de l'amertume qui les habitent. Lourde de tout ce qu'ils veulent cacher dans l'enfer déjà clos de leurs consciences flétries.
Mais ces quatre-là, tous frères et soeurs qu'ils sont, se haïssent avec trop de constance et d'acharnement pour supporter l'enfermement sans que les remugles de leur haine ne viennent très vite exhaler ses relents d'hostilité et de ressentiment, et ne rompent l'ennui et la monotonie d'une existence étriquée, dans la pénombre d'une masure aux volets fermés, en s'affichant autrement que dans des débordements d'inimaginable sauvagerie.
Comment supporter la promiscuité, la claustration, la réclusion à perpétuité sans perdre la raison, qui plus est lorsqu'on s'exècre ?
Clément, Guillaume, Suzie et Bernadette n'y échapperont pas, glissant un peu plus chaque jour dans l'animalité la plus effroyable.
Pourtant, ensemble ils ont passé un pacte et s'y tiendront.
Désormais, ils ne sortiront plus. le monde les a rejetés, ils n'y paraitront plus.
Désormais, cette maison sera leur tombeau. Et celui du lecteur qui sera assez fou pour y pénétrer à leur suite…

« Il n'y a jamais de motifs aux enfers qu'on se forge. Seulement des prétextes. »
Ecrivain français de romans policiers et de livres de science-fiction souvent primés, Claude Ecken, dans ce récit d'une insoutenable noirceur, nous sert beaucoup plus de prétextes que de motifs.
Directe, froide, incisive, la plume de l'auteur semble se délecter à gratter les plaies, à racler les chairs et s'épandre dans l'horreur. Tout est prétexte à débauche et surenchère de violence et de perversité. Chaque page nous fait gravir un peu plus les échelons de l'abjection et descendre d'autant les degrés de l'échelle de l'humanité.
L'auteur n'aurait pas démérité, nous semble-t-il, en décortiquant davantage les mécanismes psychologiques et les rouages conduisant à l'animalité plutôt que de prendre le seul parti de la description clinique et distanciée des sévices que s'infligent les personnages. le roman aurait certainement gagné en profondeur.

Une chose est sûre, il faut avoir le coeur bien accroché ou être un monstre d'insensibilité pour ne pas frémir d'horreur à la lecture de cet « Enfer clos » :
Noir comme la mort, la violence et la crasse, et noir comme la bestialité,
Noir comme des hurlements terrifiants dans la nuit, noir comme les marques de coups sur les corps meurtris, comme la lame d'un couteau pénétrant dans la chair, comme des vers boursouflant un cadavre, comme un mort qu'on démembre, qu'on dépèce et qu'on mange,
Noir comme un bébé difforme balancé contre un mur,
Noir comme le viol, la torture et le cannibalisme, comme les exhalaisons pestilentielles d'un macchabée pourrissant,
Noir comme la barbarie et la brutalité écumantes de rage,
Noir comme la cruauté gratuite et la sauvagerie exprimées dans un grand rire démentiel,
Noir comme la férocité dans les regards lubriques, noir comme l'obscénité des gestes incestueux,
« Enfer clos »…Plus noir que les ténèbres…
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