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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Poésie? Fable? Un peu les deux, pour cette histoire d'amour entre une jeune Aborigène et un trappeur irlandais.
L'autrice choisit ce biais pour évoquer tout à la fois l'Australie du XIXème siècle et la chasse aux Aborigènes, la colonisation de son territoire, et les croyances et coutumes de ce peuple natif.
Le coeur d'une nature encore sauvage où vivent ces peuples animistes est bouleversé par l'arrivée des colons européens, violents, alcooliques et racistes. Ce sont deux peuples totalement opposés qui se confrontent sur ces terres, et un miracle d'amour pur, celui de Ruby et de Jack qui se cachent pour le vivre.

En quelques pages seulement, Ali Cobby Eckermann parvient à nous raconter ce pan de l'Histoire australienne mais aussi l'état originel de ce continent avant qu'il ne soit pris dans notre temps.
C'est doux, pur, frais et poétique, c'est publié par le Vent des Iles, que je note car j'ai très envie de lire d'autres publications de cette maison d'édition.
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« À l'ombre des eucalyptus/l'ancienne chante le clan/ ».
« Ruby moonlight » litanie, fécondité verbale. Un chant intense, beau à couper le souffle.
Un roman envoûtant, 80 pages pour investir ce qui fût de Ruby, jeune femme exilée d'elle-même, l'unique survivante, son clan décimé. Elle erre, digne et vigoureuse, volontaire et serrant tout contre son coeur le poids lourd des perditions.
« Personne ne vient/elle est seule/… Sentiment de sécurité/instinct intact/ ».
Fortuitement, elle aperçoit l'allié, solitaire, vaillant, son alter-ego des quêtes infinies.
Un irlandais, jeune encore, brebis égarée dans une Australie raciste et hostile.
« Elle se réjouit que Jack soit/un homme de peu de mots/Jack se réjouit qu'elle soit/une femme de peu d'exigences/dans leur isolement/ils sont ciel/ ».
Jack le mineur, qui pressent de Ruby la fragilité d'un colibri, le rubis dans une cabane de joncs et de terre. Rassembler les migrations, quand bien même l'Australie réfute l'alliance des Européens avec les noirs. Ils savent la communion d'un langage à réapprendre. Se cacher des autres. S'abriter entre les vagues qui enserrent une terre violente et brûlante. Ils sont de grâce et d'amour, siamois des épreuves, les gestuelles indicibles. Ils affrontent le mépris des hommes, les cruautés lâches. Ils s'aiment comme des enfants, dans l'orée des interdits.
« Ruby est déchirée/entre son envie de compagne/et la nécessité de la réclusion/ ».
L'architecture est macrocosme. L'étoile du nord, le murmure de la nuit. Mais le ciel se lamente. Les plis se tendent. L'amour à l'instar de la neige fondue. Peuple qui acclame les plaintes du clair de lune. Jack, et dans ses mains les promesses aube-nouvelle. le fleuve est le vainqueur. Les boues comme des attaques rebelles sur le coeur des enfants-monde.
Les tragédies « Ruby Moonlight » les paupières closes, une goutte de sang sur la poitrine, Ruby, la finitude de l'espérance. Un linceul noir qui drape les rêves, les idéaux. L'homme blanc, les guerriers aussi, tous scellés dans le pacte d'une mort universelle.
Ce conte-fable, poème triste et lumineux, sombre et puissant est d'une force inouïe. On ressent la ferveur des sentiments, cette impossibilité d'exaltation à la vie. La folies des hommes qui refusent l'étrange (er). Ce chef-d'oeuvre est une larme infinie. Une écoute fabuleuse de Ali Cobby Eckermann. Doté de nombreux prix et traduit en plusieurs langues déjà. le renom entre nos mains. Traduit à la perfection de l'anglais (Australie) par Mireille Signol. À noter une magnifique couverture de Gabrielle Ambrym. Publié par les majeures Éditions Au vent des îles.
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Repéré en traînant sur le catalogue du site des éditions Au vent des îles que j'ai découvertes il y a peu et déjà beaucoup appréciées (@Blackbird, @La baleine tatouée), j'ai profité du mois "amours contrariées" de notre club de lecture (fév-mars 2023) pour céder à mon envie et acquérir ce petit volume plus que tentant !
L'objet-livre est très beau: sa couverture, le papier épais jaune, le texte sans faute de langue ....
Surprise, je n'avais pas vu que c'était de la poésie en prose : BONNE surprise ! Il y a des pages et des images très poétiques, magnifiques, dans ce texte. L'histoire est délicatement amenée, avec pudeur, ciselée, mais très puissante, comme tous les amours contrariées. J'admire vraiment les auteurs qui arrivent à dessiner tout un monde et des personnages en si peu de mots. C'est une histoire douce et tragique: les héros volent un peu de bonheur au milieu d'un monde rude et brutal, le bush australien de la deuxième moitié du XIX°s (après la Grande Famine irlandaise).
Félicitations à la traductrice qui a fait preuve de beaucoup d'adresse pour respecter le texte et la mise en page de l'oeuvre : un beau défi bien relevé !
Une très belle lecture !
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Avant de présenter ce livre de poésie, il est nécessaire de revenir sur le parcours de Ali COBBY ECKERMANN, « poète aborigène issue des peuples Yankunytjatjara et Kokatha. Née en terre Kaurna en 1963, elle appartient à la « génération volée », celle des enfants australiens aborigènes qui ont été enlevés à leurs familles par des agences gouvernementales ou des missions religieuses. Adoptée alors qu'elle était bébé par la famille Eckermann, elle reprit contact avec sa mère à l'âge adulte ».

Ainsi que l'annonce la page de garde, « Ruby Moonlight » ne se veut pas un recueil de poésie, mais « Un roman sur l'impact de la colonisation en Australie du Sud dans les années 1880 ». Il est toutefois une suite de poèmes en vers libres, chaque titre de ces 69 poèmes ne comportant qu'un seul mot et chaque poème présenté sur une page. Mais tous sont solidaires, soudés ensemble, pour un résultat contant une vraie histoire.

Ali COBBY ECKERMANN écrit sur les coutumes aborigènes, la vie au sein des tribus. Elle va en suivre une, victime d'un massacre alors qu'elle se trouve implantée sur ces terres depuis si longtemps. Ruby Moonlight en est la seule survivante, elle a 16 ans et raconte. Elle a tout d'abord suivi les émeus, puis est partie en forêt au bord de l'eau pour survivre seule. « la femme repose enfin son épuisement / repose son chagrin / et hume la pluie ». Dans ce superbe texte, aucune majuscule, aucune ponctuation. C'est alors qu'elle aperçoit Jack le mineur, un trappeur, l'épie, peine à l'approcher, méfiante et fascinée tout à la fois.

Les images sont simples, comme le quotidien de cette femme, elles n'en demeurent pas moins d'une grande robustesse, d'une force féministe conséquente où l'harmonie avec la nature n'est pas un fantasme, et où la cruauté humaine surgit malgré l'amour : « elle se réjouit que Jack soit / un homme de peu de mots / Jack se réjouit qu'elle soit / une femme de peu d'exigences / dans leur isolement / ils sont ciel / dans leur isolement / ils sont terre / l'isolement est indispensable / à leur fusion / il est interdit aux Européens / de forniquer avec les noirs ». La vie s'écoule au rythme des saisons, guidée par les superstitions, tandis que Jack pourrait bien avoir trouvé un trésor...

« Ruby Moonlight » est un livre pudique sur la simplicité et les sentiments, contre la colonisation, pour un retour à la vie en adéquation avec la nature, ainsi qu'un parcours de la propre vie de l'autrice en filigrane. Il est d'une beauté qui se partage, où l'intime vient rejoindre suavement l'Histoire. Il n'oublie pas l'horreur humaine, car « le son d'une lance / atteignant sa cible / est reconnaissable entre tous ». Il met en scène des personnages entiers, vrais, purs. Sorti en 2023 aux éditions Au vent des Îles (éditeur implanté en Polynésie française), il est formidablement traduit par Mireille VIGNOL qui le pare de fins attraits. Il est mis en valeur par la non moins magnifique couverture dont le graphisme est dû à Gabrielle AMBRYM. Un coup de coeur pour l'élégance, qu'elle soit dans le texte, la traduction et l'esthétisme.

https://deslivresrances.blogspot.com/
Lien : https://deslivresrances.blog..
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Ruby Moonlight, Ali Cobby Eckermann
Un ouvrage d'une grande originalité. A partir d'instants merveilleusement bien observés, où « la nature peut tourbillonner comme une feuille morte » où le confort est « assuré par le doux staccato symphonique », sans complaisance, « deux frères empestent leur domicile coin crasseux infesté de vermine », où, quoi qu'il arrive, « dans ce crépuscule un clair de lune rubis, a ruby moonnlight » vous console de tout.
Le sujet, la persécution des aborigènes australiens au XIXème siècle à l'arrivée des colons européens, test traité sans revendication, sans leçons de morale.
Par touches successives et délicates, Ali Cobby Eckermann retrace tout un univers décrit avec une grande richesse de mots où se mélangent avec bonheur plusieurs cultures, très facile à lire. Il n'y a qu'à se laisser porter par la musique des mots.
Et une mention spéciale pour la traductrice Mireille Vignol pour son rendu en français aussi poétique et vrai qu'en anglais.
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Fin XIXe – Australie du Sud. Ruby la native, la « première femme », assiste au massacre de son clan et fuit seule dans le bush où elle survit en appliquant les sagesses héritées, en écoutant les signes, en reconnaissant ses voies. Par infimes traces d'abord, se précisant avec finesse, elle découvre et se fait découvrir par Jack, un « Mick » (Irlandais venu fouiller les terres à la recherche de pierres précieuses). Il est aussi rose et roux qu'elle est brune, recouvert de peaux dont elle aime instantanément les odeurs. Il est doux et patient, au centre de sa cabane, il attend. Elle approche par cercles entre désir et peur de cet autre annonçant la fumée et la mort. Leur amour se tait. Ils se portent. le minier Jack et sa gemme Ruby s'enfoncent dans une nuit où ils voient, ils ne s'appartiennent pas mais se quittent et se retrouvent au rythme de leurs quêtes solitaires, alors que la violence stridente des possédés et des possédants, autour d'eux, fait rage et constamment les menace.
Poignant récit en vers libres (un poème par page), leur histoire est chantée par une magicienne, elle-même aborigène, aussi légère que les ondulations du serpent venu boire sur la rive, aussi puissante et incongrue que le cri du kookaburra qui brise le charme pour annoncer l'heure de rentrer.

Ali Cobby Eckermann, des « Stolen Generations », fut arrachée bébé, comme tant d'autres, à sa famille en 1963 et adoptée par des colons fermiers luthériens, avant de reprendre, adulte, contact avec sa mère biologique. Elle est aujourd'hui une poète reconnue en son pays, pour la première fois en France très bellement traduite par Mireille Vignol, spécialiste des littératures d'Océanie ayant respecté l'épure et la puissance sacrée de ces songlines, chants qui décrivent précisément les voies d'un territoire vaste, dangereux et trompeur pour qu'on puisse les reconnaître, mais assez brièvement pour qu'on puisse en apprendre des milliers, caractéristiques de ces êtres du Rêve, constamment en mouvement. J'aimerais beaucoup, à présent, le relire en anglais.
Lien : https://pamelaramos.fr/love-..
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Un court roman en vers libres que j'ai trouvé d'une beauté à couper le souffle. Je l'ai lu plusieurs fois pour mieux en savourer chaque passage. 
       En cette fin de 19e siècle, les Aborigènes se font massacrer. Ruby sera l'unique survivante de son clan. Sa rencontre avec Jack, un trappeur irlandais, est incroyable et nous remplit d'émotion. 
       La nature est partout présente, les descriptions sont brèves mais poétiques à souhait, on oublie tout ce qui nous entoure pour voyager loin, très loin. 
      L'écriture est d'une force inouïe, ce récit est à la fois sombre et lumineux, profond et percutant. Un véritable coup de coeur.
      Je ne connaissais pas cette maison d'édition, mais je suis bien décidée à découvrir d'autres livres publiés par Au Vent de Lire.

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C'est sûr le massacre d'un clan aborigènes australien que s'ouvre ce livre.

Seul rubis, unique survivante de son clan, demeure ici confronté à la nature, ne se fiant qu'à son instinct.

Lorsque ça route croiser le chemin de Jack, un trappeur irlandais, sa vie est sur le point de changer.

C'est avec une succession de poèmes lumineux, en vers libres, tantôt violents, tantôt pleins de tendresse, que l'autrice, elle-même issue d'un peuple aborigène, retrace le terrible sort de ces civilisations exterminées et abandonnés à leur sort en Australie au cours du dix-neuvième siècle.

La faune et la flore sont omniprésentes dans leurs beautés naturelles, protectrices et rassurantes, opposées à celle des hommes qui sèment la peur comme ils savent faire naître le désir.

C'est un chant onirique ancré dans la réalité, c'est un cri déchirant, c'est une poésie verdoyante, pour ne pas oublier, pour écouter et voir, les crimes et la beauté qu'abritent les hommes.
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