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Poésie? Fable? Un peu les deux, pour cette histoire d'amour entre une jeune Aborigène et un trappeur irlandais.
L'autrice choisit ce biais pour évoquer tout à la fois l'Australie du XIXème siècle et la chasse aux Aborigènes, la colonisation de son territoire, et les croyances et coutumes de ce peuple natif.
Le coeur d'une nature encore sauvage où vivent ces peuples animistes est bouleversé par l'arrivée des colons européens, violents, alcooliques et racistes. Ce sont deux peuples totalement opposés qui se confrontent sur ces terres, et un miracle d'amour pur, celui de Ruby et de Jack qui se cachent pour le vivre.

En quelques pages seulement, Ali Cobby Eckermann parvient à nous raconter ce pan de l'Histoire australienne mais aussi l'état originel de ce continent avant qu'il ne soit pris dans notre temps.
C'est doux, pur, frais et poétique, c'est publié par le Vent des Iles, que je note car j'ai très envie de lire d'autres publications de cette maison d'édition.
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Un clair de lune rubis.

Une jeune aborigène, seule survivante d'un clan décimé, erre dans le bush. Jusqu'à tomber sur un trappeur irlandais, qui vit seul dans sa cabane à l'écart des villes. Les deux vont s'apprivoiser, se lier à l'autre. Mais dans l'Australie de la fin du XIXe siècle, une telle union serait mal vue de tous si elle venait à être découverte.

Un court récit en 69 pages pour autant de poèmes. Pour autant de chants, d'incantations.

À la nature, terrible et magnifique. En peu de mots, les paysages prennent forme, prennent vie, sous nos yeux et sous nos pas. le spinifex et le sable brûlant, l'ombre des eucalyptus et la roche humide des grottes. Les perroquets et tous les chants colorés des oiseaux, les wombats qu'on chasse et les émeus qu'on suit.
La nature chante, la nature crie. Dans ce pays règne la beauté, mais règne aussi la tristesse.

Aux solitudes. Qu'elle soit subie, après avoir vu son clan être massacré, errant dans le désert pendant quarante jours ; ou voulue, dans une cabane au milieu du bush pour chasser les bêtes et vendre leurs peaux.
Des solitudes qui se rencontrent, se reconnaissent, parlent la même langue sans prononcer un mot – ils n'en ont aucun en commun de toute façon.

À l'amour, caché, secret, impossible.
Car ni les colons blancs, qui tueraient alors la femme comme ils ont tué son clan, ni les aborigènes, qui jetteraient un sort à l'homme pour qu'il la perde au profit d'un vieux danseur jaloux, ne l'accepteraient.
À la peur qui en résulte, face à l'intolérance, le racisme, la colonisation et ses conséquences.

Un court récit en 69 pages pour autant de poèmes. Moi qui suis en général peu touché par le genre, j'ai été cueilli ici.
Des poèmes de peu de mots, et pourtant envoûtants, évocateurs. Beaux dans les sensations et émotions qu'ils suscitent, chaudes comme les écailles du varan ; mais laissant un goût amer en bouche face aux ravages et décisions des hommes.
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« À l'ombre des eucalyptus/l'ancienne chante le clan/ ».
« Ruby moonlight » litanie, fécondité verbale. Un chant intense, beau à couper le souffle.
Un roman envoûtant, 80 pages pour investir ce qui fût de Ruby, jeune femme exilée d'elle-même, l'unique survivante, son clan décimé. Elle erre, digne et vigoureuse, volontaire et serrant tout contre son coeur le poids lourd des perditions.
« Personne ne vient/elle est seule/… Sentiment de sécurité/instinct intact/ ».
Fortuitement, elle aperçoit l'allié, solitaire, vaillant, son alter-ego des quêtes infinies.
Un irlandais, jeune encore, brebis égarée dans une Australie raciste et hostile.
« Elle se réjouit que Jack soit/un homme de peu de mots/Jack se réjouit qu'elle soit/une femme de peu d'exigences/dans leur isolement/ils sont ciel/ ».
Jack le mineur, qui pressent de Ruby la fragilité d'un colibri, le rubis dans une cabane de joncs et de terre. Rassembler les migrations, quand bien même l'Australie réfute l'alliance des Européens avec les noirs. Ils savent la communion d'un langage à réapprendre. Se cacher des autres. S'abriter entre les vagues qui enserrent une terre violente et brûlante. Ils sont de grâce et d'amour, siamois des épreuves, les gestuelles indicibles. Ils affrontent le mépris des hommes, les cruautés lâches. Ils s'aiment comme des enfants, dans l'orée des interdits.
« Ruby est déchirée/entre son envie de compagne/et la nécessité de la réclusion/ ».
L'architecture est macrocosme. L'étoile du nord, le murmure de la nuit. Mais le ciel se lamente. Les plis se tendent. L'amour à l'instar de la neige fondue. Peuple qui acclame les plaintes du clair de lune. Jack, et dans ses mains les promesses aube-nouvelle. le fleuve est le vainqueur. Les boues comme des attaques rebelles sur le coeur des enfants-monde.
Les tragédies « Ruby Moonlight » les paupières closes, une goutte de sang sur la poitrine, Ruby, la finitude de l'espérance. Un linceul noir qui drape les rêves, les idéaux. L'homme blanc, les guerriers aussi, tous scellés dans le pacte d'une mort universelle.
Ce conte-fable, poème triste et lumineux, sombre et puissant est d'une force inouïe. On ressent la ferveur des sentiments, cette impossibilité d'exaltation à la vie. La folies des hommes qui refusent l'étrange (er). Ce chef-d'oeuvre est une larme infinie. Une écoute fabuleuse de Ali Cobby Eckermann. Doté de nombreux prix et traduit en plusieurs langues déjà. le renom entre nos mains. Traduit à la perfection de l'anglais (Australie) par Mireille Signol. À noter une magnifique couverture de Gabrielle Ambrym. Publié par les majeures Éditions Au vent des îles.
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C'est ma première expérience avec les récits en vers libres, je commence donc par remercier Babelio et les éditions Au Vent des Îles pour cette belle découverte.

La quatrième de couverture retranscrit très bien l'histoire, je vais donc vous épargner une redite. J'ai été impressionnée par ce récit qui en dit tant sur L Histoire des Aborigènes d'Australie, qui raconte le destin de milliers de vie, en si peu de mots. Ce qui m'a fait prendre conscience que parfois, peu de mots, c'est amplement suffisant. Pour être honnête, il m'a toutefois manqué des descriptions pour me projeter durant le premier tiers du livre, notamment en ce qui concerne les personnages et les décors australiens mais je mets plutôt cela sur le compte de mes habitudes de lectrice de romans, qui ont la peau dure ;)

J'ai beaucoup aimé en apprendre plus sur le mode de vie des Aborigènes, leurs coutumes (même mortuaires) ou comment cela se passe lors des rencontres entre différents clans. J'ai surtout été touchée (et c'est ce que je retiendrai de cette lecture) par la plume de l'autrice : des mots d'une infinie douceur pour décrire la violence inouïe et sans raisons des Hommes. Un texte chantant, qui monte toutefois en tension au fil des pages, car on sent que si le calme est plat durant cette période historique, c'est que la tempête couve.

Petit bémol de mon côté concernant la fin qui m'a semblée moyennement compréhensible , l'arrivée de la magie à un point si avancé du récit m'a perturbée . J'aurai souhaité une fin plus heureuse mais L Histoire nous a déjà enseigné le sort des Aborigènes partout dans le monde.

Je suis ravie d'avoir découvert cette maison d'édition qui nous invité, à travers ses publications, à découvrir la culture océanienne. La Baleine tatouée et Bones Bay m'ont déjà fait de l'oeil, et je serai curieuse de lire vos retours si vous les avez déjà lus.
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Dans ce court roman écrit en vers libres ou plutôt en une suite de poèmes, l'autrice évoque l'histoire d'une jeune femme autochtone du 19ème siècle qui après avoir réchappé au massacre de toute sa famille va trouver, pour un temps, refuge auprès d'un Irlandais solitaire.
Les paysages du Bush sont omniprésents dans ce récit qui se faufile constamment à la frontière du rêve. En quelques mots sont évoqués les sentiments et leurs contradictions dans une Australie sombre et foncièrement raciste ou la question de l'identité est primordiale.

Un texte percutant et doux à la fois pour une narration brillante des folies de la colonisation
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Repéré en traînant sur le catalogue du site des éditions Au vent des îles que j'ai découvertes il y a peu et déjà beaucoup appréciées (@Blackbird, @La baleine tatouée), j'ai profité du mois "amours contrariées" de notre club de lecture (fév-mars 2023) pour céder à mon envie et acquérir ce petit volume plus que tentant !
L'objet-livre est très beau: sa couverture, le papier épais jaune, le texte sans faute de langue ....
Surprise, je n'avais pas vu que c'était de la poésie en prose : BONNE surprise ! Il y a des pages et des images très poétiques, magnifiques, dans ce texte. L'histoire est délicatement amenée, avec pudeur, ciselée, mais très puissante, comme tous les amours contrariées. J'admire vraiment les auteurs qui arrivent à dessiner tout un monde et des personnages en si peu de mots. C'est une histoire douce et tragique: les héros volent un peu de bonheur au milieu d'un monde rude et brutal, le bush australien de la deuxième moitié du XIX°s (après la Grande Famine irlandaise).
Félicitations à la traductrice qui a fait preuve de beaucoup d'adresse pour respecter le texte et la mise en page de l'oeuvre : un beau défi bien relevé !
Une très belle lecture !
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Une adolescente aborigène
Seule rescapée du massacre de sa tribu
Sillonne les chemins pour trouver refuge
Elle croise un trappeur irlandais
Un homme incolore
Il voit un joyau en cette jeune fille à la peau d'ébène
Elle s'appelle Ruby …

Ce court roman nous offre une histoire simple d'apparence mais qui reconstitue en même temps l'époque du colonialisme blanc en Australie et du racisme.

Ce choix d'un récit en vers libres, qui redevient très à la mode, réussit à nous captiver et à nous instiller les émotions en peu de mots tout en délicatesse.
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Avant de présenter ce livre de poésie, il est nécessaire de revenir sur le parcours de Ali COBBY ECKERMANN, « poète aborigène issue des peuples Yankunytjatjara et Kokatha. Née en terre Kaurna en 1963, elle appartient à la « génération volée », celle des enfants australiens aborigènes qui ont été enlevés à leurs familles par des agences gouvernementales ou des missions religieuses. Adoptée alors qu'elle était bébé par la famille Eckermann, elle reprit contact avec sa mère à l'âge adulte ».

Ainsi que l'annonce la page de garde, « Ruby Moonlight » ne se veut pas un recueil de poésie, mais « Un roman sur l'impact de la colonisation en Australie du Sud dans les années 1880 ». Il est toutefois une suite de poèmes en vers libres, chaque titre de ces 69 poèmes ne comportant qu'un seul mot et chaque poème présenté sur une page. Mais tous sont solidaires, soudés ensemble, pour un résultat contant une vraie histoire.

Ali COBBY ECKERMANN écrit sur les coutumes aborigènes, la vie au sein des tribus. Elle va en suivre une, victime d'un massacre alors qu'elle se trouve implantée sur ces terres depuis si longtemps. Ruby Moonlight en est la seule survivante, elle a 16 ans et raconte. Elle a tout d'abord suivi les émeus, puis est partie en forêt au bord de l'eau pour survivre seule. « la femme repose enfin son épuisement / repose son chagrin / et hume la pluie ». Dans ce superbe texte, aucune majuscule, aucune ponctuation. C'est alors qu'elle aperçoit Jack le mineur, un trappeur, l'épie, peine à l'approcher, méfiante et fascinée tout à la fois.

Les images sont simples, comme le quotidien de cette femme, elles n'en demeurent pas moins d'une grande robustesse, d'une force féministe conséquente où l'harmonie avec la nature n'est pas un fantasme, et où la cruauté humaine surgit malgré l'amour : « elle se réjouit que Jack soit / un homme de peu de mots / Jack se réjouit qu'elle soit / une femme de peu d'exigences / dans leur isolement / ils sont ciel / dans leur isolement / ils sont terre / l'isolement est indispensable / à leur fusion / il est interdit aux Européens / de forniquer avec les noirs ». La vie s'écoule au rythme des saisons, guidée par les superstitions, tandis que Jack pourrait bien avoir trouvé un trésor...

« Ruby Moonlight » est un livre pudique sur la simplicité et les sentiments, contre la colonisation, pour un retour à la vie en adéquation avec la nature, ainsi qu'un parcours de la propre vie de l'autrice en filigrane. Il est d'une beauté qui se partage, où l'intime vient rejoindre suavement l'Histoire. Il n'oublie pas l'horreur humaine, car « le son d'une lance / atteignant sa cible / est reconnaissable entre tous ». Il met en scène des personnages entiers, vrais, purs. Sorti en 2023 aux éditions Au vent des Îles (éditeur implanté en Polynésie française), il est formidablement traduit par Mireille VIGNOL qui le pare de fins attraits. Il est mis en valeur par la non moins magnifique couverture dont le graphisme est dû à Gabrielle AMBRYM. Un coup de coeur pour l'élégance, qu'elle soit dans le texte, la traduction et l'esthétisme.

https://deslivresrances.blogspot.com/
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Ruby Moonlight, Ali Cobby Eckermann
Un ouvrage d'une grande originalité. A partir d'instants merveilleusement bien observés, où « la nature peut tourbillonner comme une feuille morte » où le confort est « assuré par le doux staccato symphonique », sans complaisance, « deux frères empestent leur domicile coin crasseux infesté de vermine », où, quoi qu'il arrive, « dans ce crépuscule un clair de lune rubis, a ruby moonnlight » vous console de tout.
Le sujet, la persécution des aborigènes australiens au XIXème siècle à l'arrivée des colons européens, test traité sans revendication, sans leçons de morale.
Par touches successives et délicates, Ali Cobby Eckermann retrace tout un univers décrit avec une grande richesse de mots où se mélangent avec bonheur plusieurs cultures, très facile à lire. Il n'y a qu'à se laisser porter par la musique des mots.
Et une mention spéciale pour la traductrice Mireille Vignol pour son rendu en français aussi poétique et vrai qu'en anglais.
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Fin XIXe – Australie du Sud. Ruby la native, la « première femme », assiste au massacre de son clan et fuit seule dans le bush où elle survit en appliquant les sagesses héritées, en écoutant les signes, en reconnaissant ses voies. Par infimes traces d'abord, se précisant avec finesse, elle découvre et se fait découvrir par Jack, un « Mick » (Irlandais venu fouiller les terres à la recherche de pierres précieuses). Il est aussi rose et roux qu'elle est brune, recouvert de peaux dont elle aime instantanément les odeurs. Il est doux et patient, au centre de sa cabane, il attend. Elle approche par cercles entre désir et peur de cet autre annonçant la fumée et la mort. Leur amour se tait. Ils se portent. le minier Jack et sa gemme Ruby s'enfoncent dans une nuit où ils voient, ils ne s'appartiennent pas mais se quittent et se retrouvent au rythme de leurs quêtes solitaires, alors que la violence stridente des possédés et des possédants, autour d'eux, fait rage et constamment les menace.
Poignant récit en vers libres (un poème par page), leur histoire est chantée par une magicienne, elle-même aborigène, aussi légère que les ondulations du serpent venu boire sur la rive, aussi puissante et incongrue que le cri du kookaburra qui brise le charme pour annoncer l'heure de rentrer.

Ali Cobby Eckermann, des « Stolen Generations », fut arrachée bébé, comme tant d'autres, à sa famille en 1963 et adoptée par des colons fermiers luthériens, avant de reprendre, adulte, contact avec sa mère biologique. Elle est aujourd'hui une poète reconnue en son pays, pour la première fois en France très bellement traduite par Mireille Vignol, spécialiste des littératures d'Océanie ayant respecté l'épure et la puissance sacrée de ces songlines, chants qui décrivent précisément les voies d'un territoire vaste, dangereux et trompeur pour qu'on puisse les reconnaître, mais assez brièvement pour qu'on puisse en apprendre des milliers, caractéristiques de ces êtres du Rêve, constamment en mouvement. J'aimerais beaucoup, à présent, le relire en anglais.
Lien : https://pamelaramos.fr/love-..
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