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Critique de karmax211


Il m'a paru qu'il était sain en ces temps où la barbarie fasciste ensanglante l'Europe de l'Est et en particulier l'Ukraine - pays frontalier de la Pologne -, en ces temps où les néo-fascismes renaissent sous des apparences populistes prometteuses de toutes les promesses intenables à l'exception de celle inavouée de nous replonger dans les abysses d'une autre bête qui pourrait à terme se révéler tout aussi immonde que celle dont les cendres sont encore chaudes, en ces temps où l'extrême-droite française s'offre le luxe d'être adoubée par une France crypto-pétainisante ou crypto-poutinisante, en ces temps où depuis le 19 avril dernier, le ghetto de Varsovie s'insurge de ne pas nous voir nous insurger... il m'a paru sain de réécouter la voix d'un de ceux qui ont combattu le nazisme, la barbarie génocidaire et ont tenu tête pendant presque un mois à la Wehrmacht, et ont fait de l'insurrection du ghetto de Varsovie, un symbole, un marqueur de l'Histoire du XXème siècle et de l'Histoire tout court.
Pour cela rien ne valait la lecture du livre souvenir de Marek Edelman, juif polonais, membre du Bund ( "Le nom de Bund désigne l'Union générale des travailleurs juifs de Lituanie, de Pologne et de Russie, un mouvement socialiste destiné à représenter la minorité juive de ces régions de l'empire tsariste. le Bund eut à faire face d'une part au sionisme, d'autre part au communisme."), qui a vécu la naissance du ghetto après l'invasion par les nazis de la Pologne, ses quatre ans d'existence marqués par la misère, la faim, la maladie, la mort, le travail forcé, les sélections, les rafles, la déportation - après rassemblement sur l'Umschlagplatz : - la place du transbordement - pour les camps nazis ( essentiellement Treblinka ), la collaboration de la police juive, la passivité coupable du Conseil juif, la haine de "l'autre" pour assurer sa propre survie, les dénonciations, les vols, les trahisons, mais aussi et surtout les mouvements de la résistance juive qui se heurtèrent quasiment jusqu'au bout au refus de la communauté d'admettre la finalité d'extermination de ladite communauté par les Occupants, et qui en dépit des exécutions sommaires ( jour et nuit ), des fouilles, de la mort de nombreux camarades ne renoncèrent jamais, jamais ne baissèrent les bras, publièrent un journal ( le premier... Biuletyn ) à l'intérieur du ghetto... dans des conditions "incroyables"..., réussirent à faire rentrer des armes, des munitions et des explosifs dans le ghetto - grâce à la résistance polonaise à l'extérieur du ghetto - et sous l'acronyme OJC ( Organisation Juive de Combat ), s'insurgèrent héroïquement contre l'armée allemande à l'aube du 19 avril 1943... donnant une leçon exemplaire de courage, d'héroïsme et de dignité au monde entier.
Marek Edelman n'élude rien de toutes les questions qui se posent sur le "comment tout cela fut possible "... cette apparente résignation, cette collaboration active ou passive. Tous les procédés, toutes les manipulations des nazis pour tromper les Juifs pris au piège de ce traquenard génocidaire que fut le ghetto sont évoqués.
Comme sont évoqués les noms de ceux qui jouèrent un rôle dans cette tragédie au-delà des mots.
Parmi ces noms, j'aimerais citer ceux de quelques figures héroïques emblématiques tel Abrasza Blum ("père spirituel de la résistance armée"), Emmanuel Ringel blum ("historien, archiviste inlassable du ghetto... dont il fut le héros intellectuel"), Mordechai Anielewicz ("il fut le héros militaire héroïque de l'insurrection, chef de l'OJC, il se suicida le 8 mai 1943 avec nombre de ses camarades et après avoir tué son amie, renouvelant ainsi le geste de Masada"), et enfin - j'ai pour lui une tendresse particulière - Janus Korczak ( "écrivain, pédagogue, médecin, il accompagna dans le ghetto les enfants de l'orphelinat juif et resta avec ces mêmes enfants qu'il accompagna jusqu'à Treblinka...").
Ces étoiles continuent de briller et à travers leur lumière, vous pouvez lire ces mots :
"Un demi-siècle s'est écoulé. On pourrait croire qu'il n'est plus nécessaire d'en parler aujourd'hui. On pourrait le croire, si, sous les yeux de l'Europe, des gens ne continuaient à périr dans des conflits idéologiques, religieux et raciaux, dans des querelles et des luttes d'intérêts politiques et économiques. Après l'effroyable drame de la Shoah, la civilisation européenne a, au cours des dernières décennies, assisté aux génocides du Biafra et du Cambodge... Passive et impuissante, elle regarde aujourd'hui les milliers de gens tués, en son sein même, par la faim, le froid et la guerre dans l'ancienne Yougoslavie, elle assiste à la destruction des traces matérielles de sa vieille culture.
L'Europe se comporte comme ce promeneur du dimanche qui faisait du manège près du mur du ghetto alors que, de l'autre côté, des gens mouraient dans les flammes.
Indifférence et crime ne font qu'un.
C'est pourquoi nous devons nous souvenir de ce manège, de ces flammes, et de ces insurgés qui, après toutes ces années, réussiront peut-être à attirer l'attention du monde sur le génocide.
Puisse cet avertissement nous protéger d l'échec de la civilisation, de l'humanité, du progrès.
Puisse l'homme ne pas détruire son espèce.
Puisse le meurtre ne pas devenir titre de gloire".
Un livre témoignage, un message universel et intemporel à lire, à relire et à partager !
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