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Critique de raton-liseur


Je ne m'attendais pas à apprécier autant ce recueil ! L'étiquette « hard science fiction » me faisait un peu peur, mais M'sieur Raton a découvert cet auteur il y a quelques mois, dans la mythique et regrettée émission La Méthode Scientifique sur France Culture (mythique pour M'sieur Raton en tout cas) et il a lu dans la foulée toutes les nouvelles disponibles en français et s'attaque maintenant aux romans. Il avait très envie que je lise aussi cet auteur, mais nous craignions un peu tous les deux le résultat… Et c'est un franc succès, j'ai aimé, beaucoup aimé. Probablement pas exactement pour les mêmes raisons que M'sieur Raton, mais cela faisait longtemps que lui ou moi n'avions pas découvert un auteur de science-fiction aussi intéressant, et encore moins un auteur que nous appréciions tous les deux en même temps !
Alors oui, le côté scientifique est moins prégnant que ce que je pensais, mais je ne peux pas nier qu'il existe. Avoir une petite idée dans au moins un ou deux des domaines que Greg Egan aborde aide sans conteste à la compréhension et au plaisir de lire ces nouvelles. Mais ce qui est important est ce qu'il fait à l'intérieur de cette gangue scientifique dans laquelle il insère ses nouvelles. Et là il y a beaucoup à dire.
Une des obsessions de Greg Egan est manifestement la notion d'identité : qu'est-ce qui fait que je suis moi, mon cerveau et ses connexions neuronales suffit-il à me définir, est-il possible de répliquer ce cerveau et ce serait toujours moi, ... ? La question a des ramifications sans fin que Greg Egan ne se lasse pas d'explorer, trouvant à chaque fois des scénarios originaux, qui renouvellent le regard que l'on peut poser sur ces questions.
Et puis j'ai beaucoup aimé la façon dont, dans un certain nombre de nouvelles, il associe deux thématiques scientifiques qui a priori n'ont rien à voir ensemble. Comme dans cette nouvelle, une de mes préférées de ce recueil, Vers les ténèbres, qui joue avec l'idée des trous de ver mais qui parle surtout de lois de probabilités, et plus exactement des probabilités conditionnelles, un sujet que j'ai toujours trouvé vertigineux, et j'ai retrouvé ce vertige dans les mots du Coureur qui nous narre cette histoire, navigant entre la rationalité d'un calcul mathématique que l'on sait juste et la sensation du hasard et de la coïncidence qu'on ne peut s'empêcher de ressentir. Bon d'accord, tout le monde n'a peut-être pas ressenti ce vertige des probabilités conditionnelles, mais il y a d'autres choses dans ce recueil.
Il y a des réflexions sur l'eugénisme et jusqu'où on est prêt à aller, hein Eugène ! Il y a aussi des réflexions sur les murs que l'on est prêt à construire pour se protéger de l'autre, pour se positionner au-dessus de l'autre, et rien de tel que des Douves pour cela. Il y a des nouvelles d'une immense tristesse, ou plutôt d'une immense solitude, d'une immense détresse même parfois, comme le Coffre-fort ou Lumière des événements. Et il y a de plus dans tout cela pour quelques piques bien acerbes contre notre monde actuel, parce que ne l'oublions pas, la meilleure science fiction est souvent celle qui nous parle de nous, et celle de Greg Egan, si elle est très étayée scientifiquement, nous parle surtout de nous et de notre société, et aide à porter un regard nouveau et stimulant sur des sujets qui peuvent parfois sembler rébarbatifs.
Une belle découverte pour moi, assez inattendue je crois, ce qui ne l'en rend que plus belle.
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