AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de BazaR


Belle occasion que m'offrent Masse Critique et les éditions le Bélial' de lire mon troisième opus de la jeune collection « Une Heure-Lumière ». Occasion couplée à celle de retenter ma chance avec Greg Egan, un auteur qui m'attire mais me laisse frustré à chaque fois. le format court nous réconciliera-t-il ? Je crois, oui.

Ce qui me frustre chez Egan, c'est qu'il possède cette faculté formidable de construire des univers imaginaires à l'énorme potentiel d'évasion et qu'il la « gaspille » en se concentrant trop sur les atermoiements psychologiques de ses personnages. C'est une question d'équilibre en fait. Et pour moi la balance penche trop d'un côté.
Mais dans cette novella, l'équilibre est quasi parfait.

Le sujet du texte est avant tout sociétal et terrible. Il invoque la mémoire d'un passé pas si lointain de la première partie du 20ème siècle, quand on assistait à la libération de manière légale de sentiments de xénophobie ou de racisme ; quand les gouvernants et le vote démocratique autorisaient le peuple à haïr, voire à massacrer, une minorité désignée. Comment ne pas penser à l'affaire Dreyfus ou aux premières années du gouvernement nazi en Allemagne en lisant Cérès et Vesta ? Greg Egan n'oublie aucune composante de ces combats, en intégrant les tentatives de résistance de la minorité, la solidarité d'une partie modérée mais effrayée de la population et la pression politique imposée sur une nation étrangère prête à accueillir les réfugiés. Ce qui est horriblement bien décrit ici, c'est que la stigmatisation est organisée de manière légale, et que la résistance morale s'exerce illégalement, renommant spontanément les « résistants » en « criminels ».
Bien sûr, le texte sert aussi de signal d'alarme : ces tendances sont en train de réapparaître de nos jours, en particulier en Europe, en particulier chez nous.

Mais Greg Egan n'a pas oublié de soigner l'écrin SF de son histoire. La relation commercialo-symbiotique entre les astéroïdes Cérès et Vesta, le troc spatial qui les associe, sont étonnants et marquent l'imagination. Cela va d'ailleurs au-delà de l'emballage, car la relation qui unit les deux plus gros rochers de la ceinture d'astéroïdes intervient comme l'un des ressorts principaux de l'intrigue.

Des reproches cependant ? Disons que j'ai trouvé que par moments la technologie prenait trop de place dans les descriptions et en réduisait la force. La fin est aussi abrupte ; je ne peux pas m'empêcher de me demander comment ont évolué les relations entre Cérès et Vesta après ça. A mon avis, quelque chose a cassé.
Je n'irai cependant pas reprocher le fait d'avoir souffert à cause du thème et de la façon dont il est développé. le venin dystopique a pénétré mon sang et mis très mal à l'aise. le plaisir n'est pas le but ici ; c'est d'ailleurs une constante de la collection « Une Heure-Lumière » il me semble.

Je vais d'ailleurs enchaîner avec un bon vieux roman de Leigh Brackett pour me doucher la tête.
Commenter  J’apprécie          481



Ont apprécié cette critique (45)voir plus




{* *}