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Critique de montmartin


Dès les premières pages, j'ai su que ce livre allait me plaire. Dire que ce roman possède plus de 500 pages, quel bonheur ! le style est simple et donc facile à lire.

Manhattan Beach, décrit la vie des Kerrigan, une famille irlandaise de Brooklyn, dans le contexte de la Grande Dépression puis de la Seconde Guerre mondiale. Une jeune femme Anna devient plongeur scaphandrier pour aider à l'effort de guerre et découvre peu à peu les raisons qui ont mené à la disparition d'Eddie, son père bien-aimé ; un père qui pour faire vivre sa famille, est devenu les yeux et les oreilles de Dexter Styles, un gangster, et qui est forcé de quitter sa famille pour sauver sa propre vie. Anna est loin de s'imaginer qu'un jour elle sera amenée à plonger pour remonter un corps accroché à un bloc de béton par une lourde chaine.

La construction habile du récit, où les destins chargés de secrets des trois personnages principaux Anna, Eddie et Dexter s'entrelacent, rend l'histoire passionnante. La disparition inexpliquée du père d'Anna donne une allure de polar à ce roman et Anna n'aura de cesse de savoir ce qui est arrivé à son père et trouver les clés qui lui manquent.

Je suis rapidement tombé sous le charme d'Anna. « Elle aurait aussi bien pu être un garçon : ses bas pleins de poussière, ses robes pas très différentes des culottes courtes. Elle était un petit bout, une herbe qui pousserait bien partout, survivrait à n'importe quoi. » Une fille qui a du cran, indépendante, brillante, moderne, murie par les temps difficiles de la guerre et par une tragédie familiale. Rompant avec le rôle attendu d'une femme à son époque, elle acquiert du respect en combattant l'idée que parce qu'elle est une femme elle n'est pas assez forte mentalement et physiquement pour faire un travail exclusivement réservé aux hommes.

Je trouve que la force de ce roman écrit à la troisième personne tient essentiellement dans l'écriture réaliste et bien documentée de l'auteur. Nous voici, comme dans un film noir, à la période des incorruptibles et d'Eliot Ness, la corruption, les usuriers, les gains légitimes réglés par chèque et les gains officieux provenant de l'alcool, des filles, des cigarettes, et des loteries clandestines ; les boites de nuit, les clubs, le Syndicat, les arrangements avec les représentants de la loi, la prohibition : on emmène faire un tour les hommes qui enfreignent les règles.

J'ai apprécié la fluidité avec laquelle Jennifer Egan nous transporte des bas-fonds de Brooklyn au milieu de l'océan sur un cargo chargé de chars, de jeeps, de caisses de matériel en passant par les eaux sombres de l'East River où les plongeurs tentent de réparer les navires. L'écriture est technique et précise lorsque nous plongeons avec les scaphandriers et partageons le rituel de l'habillement. La narration se transforme en drame lorsqu'elle nous raconte le naufrage d'un cargo américain suite à l'attaque de sous-marins russes : « Un grondement vibrant déchira les entrailles de l'Elizabeth Seaman. Bien qu'Eddie n'ait jamais entendu ce bruit, il savait que c'était celui de la mer s'engouffrant dans les soutes. Kittredge donna l'ordre d'abandonner le navire et une ambiance irréelle plana, une confusion redoublée par les ténèbres et la houle qui fouettaient le vaisseau mort comme un chat tentant de ranimer une souris épuisée. »
Un roman où New York, l'océan et les bateaux sont omniprésents qui m'a passionné du début jusqu'à la fin.


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