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Nous sommes dans le début des années quatre-vingt-dix, à Tbilissi, capitale de la Géorgie, ou plus précisément dans sa banlieue. L'URSS vient de s'effondrer, mais certains héritages du passé soviétique sont encore présents, notamment l'« école des idiots » de la rue de Kertch, une institution qui accueille des enfants handicapés mentaux et d'autres qui ont été abandonnés.
C'est là que nous faisons connaissance avec la jeune Lela, dix-huit ans, elle est aujourd'hui la plus ancienne des pensionnaires du lieu, ce qui lui confère désormais un statut un peu particulier, celui d'endosser le rôle de protectrice, réconfortant les autres enfants et les encourageant à étudier, afin qu'ils puissent un jour quitter au plus vite cet endroit et commencer une nouvelle vie.
Ce qui surprend d'emblée dans la rencontre avec Lela, c'est son caractère, farouche, déterminé et cette parole qu'elle répète de manière presque incantatoire : « Il faut que je tue Vano. » Vano, c'est ce professeur d'histoire...
Rue de Kertch et autour du quartier, la vie est fragile et violente. Des enfants vont et viennent, parfois on les croirait livrés à eux-mêmes. L'ère post-soviétique se cherche encore un peu, tâtonne dans cet esprit débridé, cette soif de liberté dans des décors délabrés, tandis que des enfants grandissent et affrontent ce nouveau monde avec des envies d'oiseaux dont les ailes sont encore bien fragiles, parfois meurtries.
Lela prend sous sa coupe le jeune Irakli âgé de neuf ans, qui ne parvient pas à accepter que sa mère ne viendra jamais le chercher. Lela devient alors comme une mère, comme une soeur pour le petit Irakli qui n'en finit pas de passer des coups de fil à une mère au loin là-bas on ne sait pas où et qui s'efface peu à peu, se dérobe, s'apprête à devenir invisible.
Rue de Kertch est un endroit peuplé d'enfants comme Lela, Irakli, comme tant d'autres, un endroit peuplé de rêves et d'illusions, la mort rôde, n'est jamais loin, la violence des hommes aussi avec des regards de prédateurs... Sortir de l'institution, franchir le quartier, aller plus loin, parfois devient dangereux... Nous sommes dans l'ère post-soviétique... On se croirait ici au bout du monde, un endroit où l'on ne peut pas aller plus loin.
C'est un récit qui se pose dans un monde qui tente de se reconstruire.
Un jour, un couple d'Américains contacte l'institution par l'intermédiaire d'une certaine Madonna, - non ce n'est pas la Madonna que vous connaissez et que vous adorez -, ils ont un projet d'adoption...
Ce texte fulgurant et vorace, douloureux aussi parce qu'il s'agit d'une histoire d'enfants bousculés, malmenés, abandonnés, est écrit à hauteur d'une adolescente de dix-huit ans, Lela, formidable personnage aussi attachante qu'intransigeante, déterminée à échapper à son destin qui entraîne l'ensemble du récit et ses personnages dans une rencontre inouïe et émouvante.
J'ai été happé par ce récit qui sent la tendresse parfois abimée comme du verre brisé, les herbes folles, des cauchemars qu'ont parfois les enfants en pleine nuit, le goût amer des poires cueillies dans un verger au milieu de nulle part...
L'écriture est simple, mais suffisamment évocatrice pour me séduire et m'entraîner vers cette rue de Kertch, au bout de l'enfance, brisée, révoltée, celle qui n'a rien demandé à personne, qui ne demandait qu'à jouer comme les autres enfants avec des jeux de leurs âges, grandir, s'épanouir, comme des fruits dans un verger.
Le Verger de poires, c'est comme un huis-clos qui dit tout cela, avec pudeur, retenue, parfois une forme d'humour décalé, il y a de la joie aussi par moments dans ce lieu, ce texte n'est jamais larmoyant et c'est sa force aussi, celle qui nous entraîne presque naturellement dans les pas de ses enfants comme si nous vivions parmi eux.
Nana Ekvtimichvili, ayant habité longtemps à proximité d'un endroit qui ressemble de très près à cette « école des idiots », nous en restitue l'authenticité fragrante qui nous émeut.
C'est un récit empli d'humanité, de tristesse, d'espoir aussi, car cette maison est un endroit qui permet à des enfants l'apprentissage vers un ailleurs peut-être meilleur, qui sait, mais là c'est une autre histoire.
Plus tard, je me suis demandé ce qu'étaient devenus Lela, Irakli, leurs autres camarades aussi, Gilda, Stella, Levan... Je ne cesse ce soir de penser à eux. C'est le signe que cette lecture m'a touché au coeur.
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Librairie Les mots et les choses- Boulogne-Billancourt- 1er février 2024


La découverte imprévue de cette auteure géorgienne contemporaine...avec ce roman touchant...bouleversant, mettant en scène une bande d'enfants orphelins ou délaissés, cabossés, avec une très jeune adolescente, Lela, qui va " jouer les fées protectrices"...

Ce roman se passe dans les années 1990, appelées aussi « les années sauvages », à Tbilissi, la capitale de la Géorgie tout juste devenue indépendante. « L'École des idiots », une institution héritée du passé soviétique, accueille des enfants handicapés mentaux, ainsi que d'autres élèves, qui sont orphelins ou ont été abandonnés par leurs parents pour des raisons multiples, essentiellement économiques...

Un extrait pour situer le lieu et le contexte historique :

"Contrairement à la ville de Kertch, la rue de Kertch n'a pas de héros.Dans la ville assiégée, où l'armée nazie exterminait la population juive et non juive, dix mille soldats soviétiques livrèrent un combat acharné avant de subir une défaite définitive. Et c'est peut-être pour cela qu'après la guerre le pouvoir soviétique refusa à Kertch le titre de " ville héros ".
Cela signifiait qu'aucune subvention de l'état ne lui serait accordée et que la ville devrait se reconstruire par ses propres moyens."

Lela, une adolescente de 16 ans, décide un jour d'assassiner Wano, le prof d'histoire, tant exécré.

Au fil du récit, on en comprendra la raison : Lela a été agressée et violée.
Ce qui nous fait aimer et nous attacher à Lela, c'est qu'elle n'est pas dans la plainte.Elle se bat pour protéger les plus jeunes, les plus fragiles, elle les encourage pour bien étudier, afin de quitter cet
" orphelinat ".Ainsi, elle va prendre sous son aile le très jeune Irakli, qui se refuse à accepter que sa mère ne vienne jamais le chercher.Il s'obstine à lui téléphoner, à espérer sa venue.
Lela tente de le préparer au pire : l'abandon maternel...
Lorsqu'elle apprendra par hasard que la mère de son protégé est partie en Grèce et a bien abandonné son jeune fils, elle devient folle de rage, l'appelle et la traite de tous les noms...


Un jour, un couple d'Américains leur rend visite à l'internat, et le rêve d'un avenir meilleur paraît sur le point de se réaliser, mais d'autres surprises attendent le lecteur…

Restent la personnalité lumineuse et combattive de Lela, qui, en dépit des épreuves et des traumatismes terribles, refuse de se résigner...et à sa façon,tente de rendre le quotidien de tous ces petits abandonnés, supportable !on s'arrache également au petit Irakli , ainsi qu'à Vaska, jeune garçon, impressionné par le caractère de Lela, secrètement amoureux ( sans doute)...À tel point, qu'il décidera de lui prouver...je n'en dévoilerai pas plus...

Dans mon choix, sont intervenus à la fois les thèmes, et aussi, une couverture magnifiquement tendre et colorée.Une lecture émouvante, qui exprime , si besoin était, que parmi les premières victimes de pays malmenés par l'histoire , il y a les enfants et les femmes, toujours " sacrifiés"....!
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Tbilissi, il y a 30 ans.
Dans la capitale de la Géorgie une institution, héritage de Kroutchtev, accueille des orphelins et des enfants handicapés.
"La maison des idiots" ne dispose pas de grands moyens.
Les enfants vont et viennent un peu au hasard de la vie.
C'est la loi du plus fort, du va comme j'te pousse, la loi des garçons qui violent les filles...
Lena, une des plus anciennes du foyer devient référente auprès de la direction, elle exerce une certaine protection auprès des plus démunis, elle a aussi des rêves de meurtre..
C'est la chronique de la vie de cette institution imbriquée dans celle du quartier.
Il y a des mariages qui s'y déroulent,des enterrements aussi..
C'est dans ce quotidien foutraque qu'un couple d'américains vient chercher un enfant à adopter..
C'est un univers rude où poussent des herbes folles, de la solidarité, le meilleur et le pire.
Cette lecture nous emporte ailleurs, dépayse nos réflexes et nos reflexions.
A découvrir
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Un roman qui nous dépeint en quelques pages sur quelques mois d'été la vie dans une école-internat pour enfants handicapés mentaux et/ou orphelins, dans la banlieue de Tbilissi en Géorgie, peu après la chute de l'URSS. Inutile de préciser que l'argent ne coule pas à flot, que les locaux sont délabrés, qu'il faut se débrouiller par soi-même. Et qu'il n'y a pas d'avenir pour ces enfants moqués, rejetés.
Lela, 18 ans, est la plus ancienne. Elle a terminé sa scolarité mais reste là pour aider l'équipe enseignante, proche et respectée des enfants, obtenant même un petit poste qui lui donne une toute relative autonomie, tout en jurant de faire la peau du professeur prédateur sexuel.
Enchainement de scènes de la vie d'enfants qui font comme ils peuvent, de situations finement décrites, qui nous immergent parfaitement dans un univers, une époque et un lieu, avec des personnages cabossés très attachants, qui ont l'air a priori d'aller nulle part. Une tranche de vie à part, débridée, un peu folle, tourbillonnante, où finalement tout est possible. C'est à la fois cruel et tendre, doux et fort.
Un petit roman touchant qui l'air de rien laisse son empreinte.
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Attiré par les premières critiques élogieuses sur Babelio, je n'ai pas resisté à l'envie de me plonger dans ce roman géorgien. Las, la magie n'a pas opéré lors de ma lecture, que j'ai choisi d'arrêter après une centaine de pages (d'où l'absence de note à cette critique). Les personnages sont certes touchants ou intriguants, mais j'ai eu du mal avec le rythme du récit et le style de l'autrice, qui loin de me captiver m'ont plutôt ennuyé. Au final, je me suis senti laissé de côté par rapport aux péripéties de ce roman initiatique pourtant prometteur.

Bref, un livre que je n'ai peut-être pas lu au bon moment dans mon fil de lectures, mais qui rencontrera sans doute son public et plaît déjà à beaucoup de lecteurs.
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C'était la première fois que je lisais un livre d'une écrivaine géorgienne, l'histoire se passe à Tbilissi, la capitale de la Géorgie. Elle est racontée du point de vue de Lela, une jeune fille de 18 ans qui a passé une grande partie de son existence dans cette '' école des idiots '', des idiots qui ne le sont pas, la plupart des enfants ont été abandonnés, trouvés ou déposés par des parents qui ne peuvent pas s'en occuper au quotidien. C'était très intéressant de suivre l'histoire du point de vue de Lela, malgré son caractère parfois un peu rude, elle représente une figure d'attachement importante pour les enfants de l'école et s'investit beaucoup pour certains d'entre eux. le lien entre elle et Irakli m'a beaucoup touché. Malgré la simplicité de l'écriture, l'écrivaine réussit à transmettre une atmosphère forte, on ressent la violence et le danger tapis dans les rues du quartier, et même au sein de l'école, surtout lorsqu'on est une femme ou un enfant. Mais il y a également beaucoup d'humanité et d'espoir dans cette histoire.
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On rentre très vite en empathie pour cette bande d'enfants cabossés par la vie dans cet orphelinat de Tbilissi en Georgie. L'écriture est belle et permet de dire les choses, aussi bien drôles que cruelles, avec une puissance et une économie de moyen qui fait que l'autrice ne prend pas le lecteur pour un imbécile. Quelques ellipses, quelques suggestions, quelques allusions font que l'on devine plutôt que l'on nous explique les secrets. C'est à la fois pudique et émouvant.
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Pour Lela, l'une des protagonistes, le verger de poire est un lieu maudit. Pour elle, mais aussi pour les autres pensionnaires de “l'école des idiots”.
Ce lieu, construit sous l'URSS, recueille les enfants atteints de handicap physique ou mental… mais en quelques pages, on réalise qu'y sont accueillis, aussi, des enfants abandonnés.

Les 160 pages constituant “Le verger de poires” peuvent être lues comme une chronique du pensionnat, mais aussi de la petite ville de Kertch, Géorgie, dans les années 90. Les habitants doivent alors faire face à la pauvreté, à un temps de trouble qui suit la chute de l'URSS et la montée du capitalisme sauvage, tout en conservant des traditions patriarcales imposantes et néfastes.

C'est dans ce contexte que l'on fait la connaissance des pensionnaires, tous pleins de leurs contradictions, et toujours très attachants. Et de Lela, 18 ans, la plus âgée d'entre tous.

Si j'ai parlé tout à l'heure de chronique, c'est parce que l'on partage le quotidien de ces enfants, leurs émotions et leurs doutes. Leur vie est faite de petits et de grands rebondissements, puisqu'en quelques mois, l'ordre établi, et jusqu'ici stagnant, va être chamboulé par des révoltes, des évolutions et des révolutions…

Je ne souhaite pas évoquer tous les événements qui vont avoir lieu, parce que j'ai aimé les découvrir au fil de ma lecture et je ne voudrais pas vous enlever ce plaisir. Je vais donc directement passer à la fin!

Pas d'inquiétude! Je ne vais rien révéler , mais juste dire à quel point je l'ai trouvée réussie. Il m'est devenu rare de rencontrer une fin de roman aussi réussie. Celle-ci est particulièrement surprenante et malicieuse. Elle éclaire tout le roman d'une lumière nouvelle. Elle nous ouvre les yeux. Elle m'a donné envie de prolonger ma lecture, tout en la trouvant parfaite en soi et donc en l'acceptant comme telle.

J'espère que vous aurez la chance de découvrir cette “école des idiots” qui ne le sont pas tant, ses parts les plus lumineuses comme les plus sombres...
Lien : https://cafelecturesetdecouv..
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Le propre de la littérature est – bien sûr – de savoir se nourrir de tous les cadres, de toutes les expériences de vie. Pour Nana Ekvtimichvili, l'inspiration est venue tout droit de son enfance, alors qu'elle grandissait près de l'« école des idiots », dans la rue Kerch, à Tbilissi : « à cette époque, on avait l'impression d'être au bout du monde – un endroit où tu ne voudras jamais retourner, mais que tu ne pourras jamais oublier non plus », comme elle le décrit dans un entretien.

Ni le quartier, ni l'école, ni le roman, ne sont dénués de héros : dans la mémoire collective de l'école, ce sont d'abord Kirile et Ira qui viennent à l'esprit : tous deux ont été transférés dans des écoles « normales », ont continué leurs études à l'université, ont trouvé du travail, se sont battus pour leurs droits. Ils reviennent parfois sur les lieux de leur enfance, mais leur trajectoire les a fait passer dans un monde inatteignable et quasi-mythique pour les autres enfants.

Ce sont les années 1990 ; la chute de l'URSS et les flots de réfugiés venus d'Abkhazie font qu'il n'y a plus d'argent public : pour l'école, cela veut dire un bâtiment traversé par les vents d'hiver, dont les balcons s'effondrent et les plafonds prennent l'eau, et dont les dortoirs sont surpeuplés d'enfants parmi lesquels certains ont simplement été placés – ou abandonnés – là parce qu'il n'y a plus de places dans les orphelinats « normaux ». Seule une poignée d'adultes y est restée : Tiniko la directrice corrompue, la bonne Dali, Vano le professeur d'histoire dont la présence mutique n'est pas sans lien avec les cauchemars qui secouent certains enfants.
Ma chronique continue sur https://passagealest.wordpress.com/2021/10/24/nana-ekvtimishvili-the-pear-field/
Lien : https://passagealest.wordpre..
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Ce court roman raconte l'histoire d'un orphelinat, que tous les voisins appellent l'école des idiots. On découvre au fil de pages que, comme souvent dans ce type d'institutions on y retrouve plus d'enfants abandonnés que d'enfants handicapés. Ce qu'on y trouve aussi c'est la violence des adultes envers ces enfants que la vie a rendu très vulnérables. En toile de fond, la Géorgie des années 90,la pauvreté et l'instabilité.
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