Dits d’Hoël IV
« portrait doux et bénin de la reine Gaud »
Gaud fut douce et blonde, ses poignets comme
le lait des vaches du royaume,
ses yeux comme l’étoile du petit jour et ses
flancs comme le blé d’été.
Sa jambe comme le vol de la mouette,
ses mains comme la pluie d’ouest,
ses seins comme deux martin- pêcheurs quand
le jour vient,
son nombril comme un sourire de fées.
Son dos comme un corselet de papillon.
Son sourire comme un arc en ciel.
Sa vie comme ses jours de merveille que je
passais près d’elle.
Moi, Hoël IV, roi de Bretagne.
J’y fus oiseau jadis
Ma langue s’en souvient.
Les diables
au bord des routes
sur les chevaux pommelés des journées lentes
en automne
une femme noire de foudre attend
un promeneur malade.
petit café-tabac
je m’y vois jadis lamper du vin fort
dans des grands verres
la pluie crible la vitre
on lève la tête
tout est noir
un ruban de papier tue-mouche pend dans la pénombre.
Limericks
une angélique ingénue de Toulouse
buvait du gin en tondant la pelouse
un crocodile survint qui lui mangea un pied.
Je suis d’Armorique cette péninsule barbare
où les eaux de la terre crèvent sa peau d’herbe et d’épines
nous Celtes ivrognes errants
et tout pleins d’amertume.
C’étaient les grandes outres du ciel
dans un pays de lointaine mémoire
(…)
la nuit couchée sur les troncs couché
les bourrasques dans le cœur d’août
la pluie veuve et se traînant.
L’air des falaises habitait ton visage
Et ton corps avait des avancées de proues
Les seins fermes des soleils d’été
Tes yeux où tournoyaient des arbres.
la baïonnette s’est brisée
près de l’oreiller
dans l’oreille de la fumée
qui passe et repasse.
Dans le jardin aux fleurs vénéneuses
il y a une statue
tout près du bassin de mercure
Une guirlande de mains y pavoise
la nuit — de l’étrave à l’étambot
d’un navire où sèchent des cheveux.