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Critique de DimitriCheval


Ce livre a beaucoup fait parlé de lui lorsqu'Eric Zemmour l'a cité en 2014. Mais peu de personnes l'ont lu, et quand on voit le nombre de pages (plus de 600), on comprend pourquoi. Quel dommage que l'auteur ne cesse de se répéter et de multiplier de morceaux de biographies pas franchement passionnantes. S'il avait divisé par trois son nombre de pages, il aurait sûrement rencontré un plus grand succès. Et son propos l'aurait mérité.

En effet, Simon Epstein s'intéressait aux affrontement entre la LICA (Ligue Contre l'Antisémitisme, ancêtre de notre LICRA) et l'Action Française (association nationaliste et antisémite) depuis l'affaire Dreyfus. Il a choisi ces deux associations parce qu'elles étaient assez centrale dans leur champs politique respectif (gauche et extrême-droite). Mais quel ne fût pas sa surprise de constater le nombre invraisemblable de militants anti-racistes qui ont terminé dans la collaboration ainsi que le nombre tout aussi étonnant d'adhérents de l'Action Française à s'être retrouvé dans la résistance. Simon Epstein a donc décidé de creuser ce mystère, ce « paradoxe français ».

Ses conclusions sont les suivantes : la gauche de l'entre-deux-guerre était à la fois anti-raciste (et donc contre l'antisémitisme) et pacifiste. Mais, à partir de 1933, ces deux valeurs deviennent antinomiques. Difficile de demander à la fois la paix avec Hitler et la défense des Juifs d'Europe. le dilemme s'aggrave encore quand les panzers défilent aux Champs-Élysées : de nombreuses personnes ayant horreur de la guerre acceptent la défaite et versent dans la collaboration. D'ailleurs les exemples sont célèbres : Doriot, Pierre Laval, René Bousquet... Ce ne sont pas des brebis égarés, la LICA a gardé des (longues) listes de « traîtres », de personnes ayant écrit dans ses journaux pour ensuite servir Vichy et même participer à l'élaboration des lois antisémites de Vichy.

Quant à l'extrême-droite elle se retrouve dans le même retournement idéologique. Elle détestait à la fois les Juifs, vus comme des ennemis de l'intérieur, et les Allemands, vus comme des ennemis de l'extérieur. Mais à partir du moment où la Wehrmacht occupe notre beau pays, nombre de militants de l'Action Française se pressent de défendre la France éternelle. Ils y rencontre beaucoup de juifs et revoient, de façon plus ou moins radicale, leur antisémitisme. L'auteur analyse bien la façon dont cette organisation a contribué à effacer sa propre mémoire de la résistance. D'abord, son chef, Charles Maurras, a considéré qu'il ne fallait surtout pas faire la guerre à Hitler au moment où l'Allemagne s'occupait du problème juif. Il ne cessait de fustiger les résistants (terroristes...), les juifs, les franc-maçons, les bolcheviks. Bref le chef n'a pas brillé par sa défense de la patrie pendant la deuxième guerre mondiale, au contraire. Or, les anciens de l'Action Française ont préféré reformer les rangs, réconcilier les anciens collaborateurs et anciens résistants pour les prochains combats, notamment en Algérie, plutôt que de traiter, comme l'a fait la gauche, les pétainistes comme des monstres immoraux dont il faut radicalement se détacher.

Néanmoins, tout cela est très bien expliqué en introduction et en conclusion (et elles sont déjà très répétitives). Au milieu, l'essentiel de l'ouvrage n'est pas palpitant, à moins d'être passionné par le sujet. On peut noter quand même la parcours politique pré-deuxième guerre de De Gaulle (que je connaissait déjà) ou celui de Mitterrand (que j'ai découvert) qui ne manquent pas d'intérêt, surtout la façon dont le second a soigneusement souhaité effacer son passé à l'extrême-droite. Bref, cet ouvrage est difficile à digérer mais il ne manque pas d'intérêt si on réussit à le lire en diagonale.
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