AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de afriqueah


L'idée d'Annie Ernaux est que le fait d'écrire est une action interdite devant entrainer un châtiment. Peut être celui de ne plus pouvoir écrire quoi que ce soit ensuite.
La pub, quoi, c'est interdit, donc je le fais.
On est tous pendus à ses lèvres : va-t-elle y arriver, ou non ?
Sauf que depuis qu'elle a réussi à écrire ce récit, elle a l'impression qu'il s'agit d'un événement banal, plus fréquent que l'on ne pense dans les familles : son père a voulu tuer sa mère quand elle avait 12 ans.
Pas cool pour celle qui veut choquer en écrivant.
Peut-être le récit, tout récit, rend normal n'importe quel acte, y compris le plus dramatique. Alors là, bam, ce qu'elle va écrire serait-il normal ?
Vous avez dit normal ?
Le récit ne crée pas la réalité, il la cherche, les mots doivent se plier dans cet acte auto-ethnologique qui est de chercher sa propre vérité.
Le sentiment de honte (social, un peu beurk, la chemise de nuit pleine d'urine de sa mère) est aussi un sentiment de honte éprouvée à 12 ans, : il lui a été impossible d'en parler, et sans doute aucun livre n'arrivera à être à la hauteur de ce que la petite Annie a éprouvé.
Lorsque le père s'emporte, et elle se sent responsable : « il n'y avait de faute ni de coupable nulle part. Je devais seulement empêcher que mon père tue ma mère et aille en prison. »
Comme d'habitude, ce qui l'intéresse en premier lieu c'est le fait non de l'avoir vécu, mais de pouvoir l'écrire.
Or personne ne peut entendre une chose aussi énorme, la possibilité d'un meurtre. Écrire, c'est rendre normal n'importe quel acte même dramatique.
« J'ai toujours eu envie d'écrire des livres dont il me soit ensuite impossible de parler, qui rendent le regard d'autrui insoutenable. Mais quelle honte pourrait m'apporter l'écriture d'un livre qui soit à la hauteur de ce que j'ai éprouvé dans ma douzième année. »

Elle se fait pour cela l'ethnologue d'elle-même, son unique souci, et de son milieu, citant les expressions, qu'elle croit être «  de son milieu » alors qu'elles sont «  de notre temps. »
La honte, pour un ethnologue, ne pas savoir de quoi elle parle, avoir honte d'un passé pas du tout honteux (à part son histoire d'essai de meurtre) bref essayer de nous faire pleurer sur ce monde d'avant la consommation.
Nous ne coupons pas à l'évocation des règles désirées et des serviettes hygiéniques, c'est un grand leit motiv de notre autrice préférée et, qui sait, le secret succès vis-à-vis des jurés du Nobel ?
Allez savoir.


Commenter  J’apprécie          5242



Ont apprécié cette critique (52)voir plus




{* *}