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Critique de LaBibliothequeDeReb





L'événement d'Annie Ernaux.

« La seule vraie mémoire est matérielle »

Annie Ernaux expose l'événement qui a eu lieu en janvier 1964, elle avait 24 ans alors. Enceinte d'un homme qu'elle côtoyait pour le plaisir ou parce que c'est ainsi que ça se faisait, elle ne sait pas trop, elle est confrontée a la nécessité viscérale d'avorter. Rappelons le, ce n'est qu'en 1975 que la dépénalisation de l'avortement a été amorcée.
Nous comprenons donc qu'un avortement en 1964 ça se fait nécessairement clandestinement.

Et qui dit clandestinité, dit moult combat pour trouver la personne qui acceptera de procéder à l'acte avec les risques légaux et physiques que cela induit. Annie Ernaux raconte comment elle a atterri impasse Cardinet dans le XVII arrondissement de Paris.

Elle exprime la souffrance indicible ressentie le jour J, la fameuse nuit du 20 au 21 janvier. Elle exprime le calvaire des émotions dans son esprit, l'incapacité de vivre autre chose normalement tant que l'événement n'a pas eu lieu. Elle décrypte son état mutique avec des bribes de son agenda de 1963-1964, se servant ainsi de la preuve matérielle des ressentis. Sans jamais sombrer dans une part de lyrisme dû aux souvenirs altérés. L'événement n'a rien de lyrique. Elle aurait pu se laisser tenter par une écriture enrobée pour séduire mais elle emprunte son ton le plus sincère, cru pour dessiner la puissance de sa galère, elle, jeune fille qui venait de faire un transfuge de classe.

Elle fait de cet événement une condition sine qua none pour désirer un enfant, se sentir en adéquation avec la violence qu'induit le fait d'être enceinte et d'accoucher. Je ne sais pas d'où elle a pu tirer cette force pour transformer l'événement en désir. Il y a dans ce livre une force qui a la fois m'échappe et me tord l'estomac. Car elle ne laisse rien au hasard, c'est brut et c'est à lire. A lire pour se souvenir d'où nous venons, pour conserver en mémoire l'indicible.
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