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Critique de Sachenka


La Malinche. Elle fait partie de ces personnages historiques qui ont soulevé la controverse, qui ont fait couler beaucoup d'encre (du moins chez nos amis du sud). En tant que maitresse et interprète de Hernan Cortès, elle contribua à la conquête de son pays natal et à la chute de sa civilisation. Honnie, elle représenta la trahison, presque le mal, mais en même temps elle sut inspirer la pitié. Puis, plus tard, par ses enfants fruits de ses unions avec des Espagnols (donc de cultures mixtes), elle devint le symbole de l'union des deux peuples fondateurs du Mexique actuel.

Mais je fais tout à l'envers. Commençons par le commencement…D'ailleurs, c'est par là que l'auteure mexicaine Laura Esquivel fait débuter son histoire : la naissance Malinalli. (En effet, elle suggère que Malinche serait plutôt un surnom de Cortès.) Déjà l'enfant était prédestinée à un grand avenir, du moins tous les signes allaient en ce sens. Compte tenu du manque de sources, on peut parier qu'il s'agit plutôt d'une vision très romancée. Quoiqu'il en soit, on passe rapidement sur sa jeunesse, mais c'est déjà plus que beaucoup d'autres biographies. Il suffit de dire qu'elle s'est retrouvée assez tôt sur le chemin de Cortès et de son armée.

Le reste de son histoire, on le connaît assez bien. Et, en ce sens, c'est un peu dommage. Pourquoi s'attarder si longuement sur des épisodes déjà connus de l'histoire de Malinalli ? Une très grande partie de l'histoire concerne la conquête du pays des Mexicas (c'est ainsi que l'auteure dénomme les Aztèques), les raisons pour lesquelles ces derniers ont tardé à réagir, les croyances religieuses de ses concitoyens, les expéditions de Cortès, etc. Très politique. À la fin de ma lecture, j'avais ce léger sentiment d'insatisfaction. Je n'avais pas l'impression d'avoir tant appris sur ce personnage important. Elle demeure encore une énigme…

Je ne veux pas avoir l'air trop négatif, j'ai trouvé ce roman intéressant et plusieurs passages étaient beaux. Je pense entre autres aux splendeurs de Tenochtitlan, au moment où Cortès voit Malinelli s'immerser nue dans un lac (symbolisant le Dieu des Eaux) ou encore à la cérémonie de purification qui s'ensuivit. Mais ces moments étaient balancés par de longues descriptions des états d'âmes de la jeune femme. Quels débats intérieurs !

Laura Esquivel essaie de justifier les actions et le rôle de Malinalli, de la présenter comme une victime. Pouvait-elle résister à Cortès ? Pas vraiment, j'en conviens. Mais la destruction de son peuple était-elle la seule issue possible ? Il est facile aujourd'hui de voir en l'arrivée des Espagnols la destruction de la civilisation aztèque mais je ne crois pas que les acteurs de cette époque violente voyaient les choses ainsi ni qu'ils l'aient envisagée. Pareillement pour les Mexicas, tellement certains de voir en l'arrivée des conquistadors un châtiment céleste. Je veux bien croire qu'ils y aient pensé et que cela les ait paralysés un moment mais ça me semble un peu réducteur.

Parce que, au final, c'est de ça qu'il s'agit : un choc de civilisations. le monde des Espagnols, cupide et catholique, affronte celui plus coloré des Mexicas, avec Quetzalcoalt, le reste de son panthéon mystérieux et tous les sacrifices qu'il imposait. Mais la fin de ce monde n'est pas une fin en soi. J'ai beaucoup aimé l'idée derrière le dernier chapitre, deux cultures qui se fondent en une seule pour créer quelque chose d'unique.

Je suppose que Laura Esquivel s'est permise quelques libertés avec les faits, mais quel auteur de roman historique ne passe pas par là ? J'ai trouvé ce roman un peu plus crédible que « Azteca » de Gary Jennings (que j'avais apprécié) mais, si vous aimeriez lire un point de vue original et intéressant sur cette période cruciale, je vous suggère le bref « Les deux rives » de Carlos Fuentes.
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