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Critique de horline


Chez Guillermo Fadanelli, Mexico est une ville sordide, une «ville monstre», une ville carnivore avec des «trottoirs aussi étroits que des boyaux». Dans chacun de ses romans, elle dévore ceux qui y vivent et ceux qui osent s'y aventurer. Avec la conscience de la globalisation dans Hôtel Df, ici Mexicains comme étrangers se dissolvent dans une ville mondialisée qui n'a plus aucun charme pour un auteur qui y voit un espace littéraire à sa mesure, le foyer vital de son oeuvre.

Vous l'aurez compris, plus qu'un roman, Hôtel Df est avant tout un prétexte pour tirer le portrait en négatif d'une mégalopole contemporaine. L'auteur nous livre un roman pour ainsi dire sans intrigue autour de l'hôtel Isabel dont les allées et venues des touristes alimentent le récit. Les personnages y vivent des expériences plutôt vaines, inconsistantes, une manière de rappeler que l'hôtel n'est qu'un lieu de rencontres futiles et illusoires, un lieu de passage où règne l'anonymat.
Hôtel modeste à la jolie façade coloniale, il ne sert donc pas de refuge face à un réel médiocre et désabusé, il en est le miroir. Un miroir dans lequel se reflète non seulement une certaine vacuité du monde mais aussi un paysage de violence, de drogue et de crime organisé bien trop familier à Mexico.
Face à un tel environnement, on s'attend à ce que l'intrigue se noue derrière les portes des chambres une fois qu'elles sont closes, la mafia occupant l'une des ailes de l'hôtel, mais l'auteur balaie avec indifférence ce qui préoccupe fébrilement les personnages. Mêmes les événements les plus dramatiques n'ont pas vocation à être des éléments perturbateurs, Guillermo Fadanelli glisse sur la tragédie comme sur la banalité du quotidien.
Alors que retenir de ce genre de bouquin qui se dote par ailleurs d'un narrateur passablement désenchanté, «un homme sans ambition, dépourvu d'opinions, et de sujets importants» qui promène sa silhouette parmi les clients et le personnel de l'hôtel et se contente d'écouter et de regarder ce qui s'offre à lui ?
Rien si on s'arrête à l'intrigue squelettique et au style désincarné de l'auteur qui donne à toute chose le goût prématuré de l'amertume. Il y a peu de place pour le rêve et la fantaisie digressive dans ce roman parce que l'auteur ne croit qu'en la puissance de la réalité.
A la manière d'un Bukowski, mais bien moins contondant que celui-là, Fadanelli se fait l'apôtre d'un réalisme qui montre les imperfections au grand jour. Des personnages sans morale mais pas sans principes, la vie dans ce qu'elle a de pathétique, le sentiment d'échec, la désillusion, etc...
On parle de réalisme sale pour caractériser l'écriture de Guillermo Fadanelli, mais cette expression ne dit rien de la rupture suscitée par ses oeuvres qui composent avec la violence devenue ordinaire et l'apathie qui semble être pour l'auteur la seule réponse possible.
Malgré tout ce noir, l'auteur parvient à faire exhumer de l'humour, seule manière de survivre dans ce monde chaotique.
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