Guillermo Fadanelli - Boue
Guillermo Fadanelli vous présente son ouvrage "Boue" aux éditions Bourgois, à l'occasion du Festival América - Édition 2010 - Vincennes. http://www.mollat.com/livres/guillermo-fadanelli-boue-9782267020151.html
En réalité, c'était la première fois que je l'entendais haleter de la sorte. Comme je l'ai dit plus haut, sans peine, bien sûr, je ne connaissais pas ces halètements car lorsque je la pénétrais elle préférait feuilleter une bande dessinée, ou dormir. Et si une fois elle a émis un gémissement, c'est parce que je lui pressais une côte ou qu'elle était à bout de patience.
Celui qui n'a jamais trouvé sa femme en train de baiser avec un autre sera incapable de comprendre comme on peut prendre cette découverte avec autant de calme.
A dire vrai, quand on est jeune on ne pense jamais qu'il soit possible de cesser de plaire aux femmes. On croit que le masculin surmontera les années et qu'il y aura toujours une femme pour reconnaître cette masculinité cachée sous tant de rides, ternie par la cape scintillante d'une calvitie obscène. Ça ne se passe pas comme ça. Dès que vous êtes précipité dans la décennie des cinquante, vous commencez aussi à pressentir que le sexe a une fin et, ce qui est pire, ce qui en terme d'humanité est absolument injuste: vous vous rendez compte que vous serez témoin de votre propre déchéance, invité à votre propre mort.
J'ai donc appelé mon frère unique, de trois ans mon aîné, et plus velu que moi, marié à une femme devenue vieille à trente ans, père de quatre enfants, idiots pour la plupart, à l'exception de la benjamine, qui lorsqu'elle a pris conscience de la décrépitude morale de ses aînés a donné un autre cours à sa vie: Irma Torrentera, une jolie fille, pas comme ses frères dont, en plus, j'ai oublié les noms.
« Ce vendredi là, personne ne cracha dans ma soupe… Les bêtes, absorbées dans leurs aliments, me permirent de mâcher tranquillement mes bouchées et de boire sans l’angoisse des quatre premiers jours. »
« Le Règlement : une Table de Moïse, un livre divin que l’on invoquait pour commettre des atrocités, mais que personne ne connaissait ; une Bible écrite en Hébreu qu’aucun de nous, monolingues sans éducation n’avait la possibilité de déchiffrer. Confisquer, saisir, détourner, activités préférées des gouvernements mexicains, de leur police, de leurs agents du fisc, de leur institutions militaires : de la rapine et encore de la rapide. »
Dans un cimetière, quelque part dans le monde, en Catalogne, à Naples, les restes d'un ancêtre anarchiste ne me laissent pas en paix. "Celui qui obéit est fait de la même pâte que celui qui donne les ordres : ils sont complices, amants, et ils danseront une valse éternellement", disaient à mon oreille les fantômes provocateurs.
je ne voulais rien savoir de son passé. A quoi bon ? Tout homme, ou presque désire que sa femme naisse à l'instant où il pose ses yeux sur elle