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Critique de Dessert


Les Carnets du Dessert de Lune, 90 p., 12 €

« Encouragé par Joyce Mansour, Henri Michaux et Dominique de Roux »… Découvrir le triple patronage qui présida aux destinées littéraires de Daniel Fano permet de mieux s'orienter dans l'oeuvre atypique qu'il poursuit depuis 1966. Entre le surréalisme des deux premiers et l'immédiateté revendiquée par le troisième, Fano a su se tracer une voie et se tailler une voix, afin de tenir la chronique d'un monde perturbé : le nôtre. Chacune de ses pages réverbère l'image d'un plurivers angoissé, fragmenté à l'extrême, où le règne triomphal des apparences taille la part belle à la pénible survie du réel.
Au programme de son dernier recueil, décrit comme la « queue de comète » de son vaste projet : déraillements de sens, sub- et per- version des images, anacoluthes temporelles, cut up à même le cadavre exquis du verbe. Et dès le titre, en guise de commandement fondateur à la civilisation du non-sens, cette injonction paradoxale : Ne vous inquiétez plus c'est la guerre. Mais quelles raisons y aurait-il donc de s'inquiéter, s'il demeure ne fût-ce qu'un antiphonaire de la trempe d'un Fano pour bien nous faire comprendre que la poésie peut aussi s'assumer comme un déchant, et que c'est même là son seul moyen de se prétendre « contemporaine » ?
L'on dérape donc davantage que l'on ne sautille au fil de ces proses qui, pour certaines, présentent un incipit romanesque traditionnel : « Dans une poche de son imper, la police trouva un exemplaire de Feu pâle, qu'il avait acheté la veille… » Cela pourrait frapper les trois coups d'un polar minimaliste, mêlant érudition et hard boiled. Non, il faut enchaîner : passage en coup de vent par Pékin où la calvitie est interdite aux taximen, exercice de maintien d'un requin en position d'« immobilité tonique », et enfin notule sur les TOC de l'inexplicablement prénommée Cassiopée. Clap final et séquence suivante.
On l'aura compris, lire Fano est une expérience unique. de gauche à droite, c'est coups de gouvernail, incessants ; de haut en bas, c'est coup de foudre, instantané. La tempête passée, nous abordons, époustouflés mais ravis, en Poésie, ce domaine dont, définitivement, « la surface est interdite aux simples mortels »…
© Frédéric Saenen in le Carnet et les instants, avril 2015

Un travail précis de marqueterie plus la tension
Ne vous inquiétez plus c'est la guerre ✶✶
DANIEL FANO
Les Carnets du Dessert de Lune, 90 p., 12 €
Daniel Fano a construit un de ces nouveaux kaléidoscopes dont il a le secret, fragments du monde placés sous une lumière crue où se révèlent des personnages souvent connus. Les légendes sont tordues, le flux d'informations rythme les pages comme il rythme nos jours. Avec, à l'arrière-plan, une remarque qui suscite des questions : « On peut facilement transformer une information douteuse en vérité encyclopédique. »
Le collage semble fait au hasard, mais il nous entraîne du côté de la lucidité où le bien et le mal se confondent dans des constructions qui nous dépassent. du moins en apercevons-nous ici quelques saillies qui ont échappé à la globalité broyeuse de sens et qui fournissent matière au sourire autant qu'à la réflexion. La poésie de la juxtaposition suppose un travail précis de marqueterie et une tension qui ne se relâche jamais.

© PIERRE MAURY, le soir 23/02.2015. Supplément spécial Foire du Livre de Bruxelles

Lien : http://www.dessertdelune.be
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